A toi
Je te donnes , ces étranges oiseaux aux flashs nyctalореs
Dans les trains du tiers monde , ou la rythmique saccadée,
Des enveloppes entorses, des regards vagues,des échappées,
Des odeurs familières, des souvenirs, nos sens isotropes.
Des formules que tu connais si bien,
Et ce chant revenu comme celui d'une antienne
Des parfums survolant ce monde accroupi
Et ma joie démarrée quand j'allais te connaître .
La tienne qui s'enfuit comme un quartier d'orange amère
Le cœur qui se fond au creuset de tes reins
Sans avoir su vraiment déchiffrer toute la peine ,
Ce code entre nous , comme un signe entre amies
Des mains qui se tendent sans jamais se reconnaître
Une sœur , une confidente , ou bien encore une mère...
Je te donnes ces voluptés intenses qui nous aident à souffrir
A voir ainsi jamais s'accomplir tous nos rêves
Des vagues de рlаіsіг qui viennent toujours mourir
Sur l'écueil de nos vie n'acceptant pas de trêve
Je te donnes une à une des énumérations bien compilées
Laissant derrière elles la moitié de nos vies
Comme un pâle simulacre tranchant comme des épées
Peut Réduire en un jour ce qui fut accompli
Je te donnes ma sincérité , ma foie et tout mon amour
Quand toutes à leurs paroles enfanteraient des merveilles.
J'étais née pour ces temps ou toi tu m'attendais
Cherchant dans la vie un recours salvateur .
Mais rien dans mes pensées ne justifiait le discours ,
De ta main , tes sеіпs пus , ta Ьоuсhе ou ton oreille
De ces mots falsifiés que l'on rend faux pour le vrai
Et des formules apprises avec le temps par cœur.
Je te donnes ou plutôt je te rends ce que tu m'a appris à voler
J'étais un ange cependant , et , débordant d'une illusion naïve
Nous voyais tous les deux , bien mieux , qu'un drame à la mode
Mais j'ignorais encore le goût amer et délicieux
Qui nous régale quelque fois d'une banale tragédie .
Alors reprends tes promesses comme les larmes que nous pourrons verser
Car il n'est pas de regrets qu'un cœur sain n'avive
Les temps ont bien changé , comme une femme change de robe
Mais cet habit là ne peut tromper le regard des yeux
Car Ils savent parfaitement tout les biens qu'on епvіе .
Je souffres , et alors , t'en inquiètes-tu maintenant ?
Vingt années ont passées dans ce joyeux miroir
Pendant que sur ma couche il me fallait y croire
Et croire toujours , en un rêve inconstant...
Je te donnes ma vie , fais-en ce que tu veux
Comme tu l'a fait déjà dans notre propre jeunesse
Les mensonges que tu dis sont pour moi des aveux
Et rien n'en contredit sur le fond la justesse
Je te donnes un lien dont les nœuds tout puissants sont la trame
Je meurs à ce monde et tu voudrais me retenir?
Si bien que notre temps se passe à comploter...
Qu'est-ce donc qu'oublier si ce n'est que mourir ?
Et dégrader encore un peu ce qui reste de notre âme .
Je cherches un peu de joie , mais sans trop y compter...
Je te donnes les reliques de mon idole préférée
Elles se fondent en toi comme un accord parfait
Une tempête qui s'éloigne quand la houle est calmée
Un fard découvrant enfin les écueils de ton portrait
Je te donnes tout ce que tu n'a pas cru en moi
Je n'en ai plus besoin ,puisque tu t'es enfuis
Quelques jours de cela qui sont tout au fond de toi
Une sève au cœur du fruit que tu ne veux plus aujourd'hui
Je te donnes ces belles contrées , villes , châteaux ou campagnes
Cependant que mes yeux humides dans l'ombre transparente
Cède à ton cœur ce que tu n'a pas voulu de moi
J'aime- mais voilà bien un mot qu'aucune nature n'épargne !
Et encore moins la tienne qui trouve là une belle descente
Le cœur a beau mentir , mais le mal reste roi
C'était un mal vulgaire , que tu pouvait sans péril
Guérir dessous ton aile et rendre ainsi stérile...
Des chats miaulaient...
Dans la cour à Paris l'Apollinaire pleurait
Sous les néons canailles illuminant ma pluie
Dans la rue Mortinat je me souvint de lui...
Avril-mai-juin 1984 par Alison Emma