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L'amour, l'amour, encore et toujours - 2 - Littérature & poésie

Sujet de discussion : L'amour, l'amour, encore et toujours - 2
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 4 août 2012 à 22:02
    Encore un poème de Luís Vaz de Camões.

    Je ne veux pas vous ennuyer avec de la technique mais j'avoue que, pour rendre les merveilles de sonorité de l'original, dont les chuintantes, les sifflantes, le son "o" ouvert, la diphtongue "ei", les sons vocaliques plus clairs que sombres donnent, doucement et tendrement, son unité à ce poème, selon le principe de "l'harmonie imitative" (le deuil est dit par le sens des mots autant que par les sons de tous les mots), j'ai été obligé pour les cinq premiers vers de quelque peu m'éloigner du texte. Quelquefois il vaut mieux trahir, car ainsi l'on rend avec davantage de fidélité l'original. Laissez-vous porter par les sons des sentiments : un amour a fini tragiquement ; le désespoir est là.



    Le texte portugais est un chef-d’œuvre.
    Et il demande une lecture calme et posée.
    Le chagrin dans son ampleur ne s'expédie pas !


    --- TEXTE PORTUGAIS :

    O céu, a terra, o vento sossegado ;
    as ondas, que se estendem pela areia ;
    os peixes, que no mar o sono enfreia ;
    o nocturno silêncio repousado...

    O pescador Aónio que, deitado
    onde co vento a água se meneia,
    chorando, o nome amado em vão nomeia,
    que não pode ser mais que nomeado.

    “ Ondas - dezia -, antes que Amor me mate,
    tornai-me a minha Ninfa, que tão cedo
    me fizeste à morte estar sujeita. ”

    Ninguém lhe fala. O mar, de longe, bate ;
    move-se brandamente o arvoredo...
    Leva-lhe o vento a voz, que ao vento deita.



    --- TRADUCTION FRANÇAISE :


    Le ciel, et la terre, et les vents pacifiés ;
    Les eaux qui s’épandent au sable qui s’égrène ;
    Les animaux des mers, que le sommeil refrène ;
    Le silence nocturne en paix qui est posé...

    Ange, le pêcheur qui, de tout son corps jeté
    A l'endroit où le vent avec l’eau se démène,
    Pleurant, nomme le nom aimé, de façon vaine,
    Car celui-ci ne peut plus être que nommé.

    « Eaux - disait-il - avant que l’Amour ne m’abatte,
    Rendez-moi ma nymphe, à laquelle d’un seul trait
    Vous avez à la mort fait qu’elle soit sujette. »

    Nul ne lui parle ; au loin n'est que la mer qui batte ;
    Dans un balancement tendre sont les futaies…
    Le vent balaie sa voix, qu’au gré du vent il jette.


    [Traduction personnelle de Climax69007]


    Comme c'est beau, même dans la tristesse, un sonnet de Luís Vaz de Camões

    Bonne lecture !!!
    Et merci pour votre lecture !

    A propos y a-t-il des grands poètes classiques ou des beautés plus contemporaines que vous aimeriez faire connaître à nous tous ? Ça me ferait рlаіsіг, et sans aucun doute à d'autres aussi.

    J'ai - par exemple - un penchant pour les italiens (pas seulement les garçons, superbement machos et méridionaux), Salvatore Quasimodo, Sandro Penna, Giuseppe Ungaretti. Pier Paolo Pasolini (ah "La Nouvelle Jeunesse" en frioulan, la langue de sa mère). En connaissez-vous ?

    Allez, des poèmes !!!
  • bugsbunny Membre expérimenté
    bugsbunny
    • 4 août 2012 à 23:50
    qu'est ce que c'est beau l'amour
  • lefablio Membre élite
    lefablio
    • 5 août 2012 à 05:53
    On croirait entendre sa complainte, portée par le vent dans les futaies..
    Merci pour ce voyage...
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 5 août 2012 à 17:41
    Notre poète, qui n'était pas un noble fortuné, a dû parcourir le monde, guerroyer (il y perdit un œil), vivre dans les États Portugais de l'Inde colonisée (où il administra les biens des absents et des défuпts & où il aima une jeune chinoise qui périt noyée), faire des poèmes en hommage à d'illustres personnages, et composer des déplorations fuпèbres aussi.

    Vous trouverez ci-dessous la plus belle déploration fuпèbre qu'il ait composée : une composition, venant de lui-même & sans attente de salaire, pour un homme dont le destin rappelait tellement le sien qu'on y sent vibrer une note de sincérité et d'implication rare dans ses autres odes fuпèbres.

    La tendresse à titre posthume !

    ------ TEXTE PORTUGAIS :

    No mundo poucos anos e cansados
    vivi, cheios de vil miséria dura ;
    foi-me tão cedo a luz do dia escura
    que não vi cinco lustres acabados.

    Corri terras e mares apartados,
    buscando à vida algum remédio ou cura ;
    mas aquilo que, enfim, não quer Ventura,
    não o alcançam trabalhos arriscados.

    Criou-me Portugal na verde e cara
    pátria minha Alenquer ; mas ar corrupto,
    que neste meu terreno vaso tinha,

    me fez manjar de peixes em ti, bruto
    mar, que bates na Abássia fera e avara,
    tão longe da ditosa pátria minha !





    ------ TRADUCTION FRANÇAISE :


    En ce monde, fort peu d’années, et accablées,
    J'aurai vécues, emplies d'âpres misères dures ;
    La clarté de mes jours vint si vite à l'obscur
    Que je n'ai pas vu cinq de mes lustres achevés.

    J’ai parcouru des terres et des mers éloignées,
    En cherchant à ma vie un remède ou sa cure ;
    Mais ce que ne veut pas enfin un furieux Sort
    Reste hors de la portée des entreprises osées.

    Portugal me nourrit dans ma verte et ma chère
    Patrie, mon Alenquer ; mais une humeur fatale,
    Qu’en ce vase terrien qui est le mien j'avais,

    M’a repu de poissons, dedans ton sеіп, brutale
    Mer, qui te fracasses à l'Ethiopie non prospère,
    Tellement aux lointains de ma patrie comblée !


    Triste ? OUI !

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