Et nous allons clore la saison des amours dues à Luíz Vaz de Camões - car demain je prends le TGV pour la Bretagne, loin de tout ordinateur, loin des grandes villes, vers Quimper et la Pointe du Raz -, avec ce poème, en forme de sonnet, sur un des traits du sentiment amoureux que l'on voudrait volontiers oublier, pour n'en voir que le doux écoulement.
Le caractère soudain, impitoyable, incertain, ténébreux, ravageur de l'amour triomphant ; et le fait qu'il ait partie liée, comme tout sentiment positif, avec son revers, la mort !
Non je n'essaye pas de vous refiler un éventuel cafard, mais les jeux de mots classiques sur "Amor", "Mors/Mortem" (en latin), "Amour", "A mort !!!" (en français) ne sont pas des jeux d'habileté sémantique mais ils traduisent les jeux d'équilibre où nous somme des fuпambules sur le fil tendu de la vie.
TEXTE PORTUGAIS :
Está o lascivo e doce passarinho
com o biquinho as penas ordenando,
o verso sem medida, alegre e brando,
espedindo no rústico raminho.
O cruel caçador (que do caminho
se vem calado e manso desviando),
na pronta vista a seta endireitando,
lhe dá no Estígio lago eterno ninho.
Dest’arte o coração, que livre andava
(posto que já de longe destinado),
onde menos temia, foi ferido.
Porque o Frecheiro cego me esperava,
pera que me tomаssе descuidado,
em vossos claros olhos escondido.TEXTE FRANÇAIS :
Tout affairé le doux et folâtre oisillon,
De son bec délicat son plumage ordonnant,
Son poème innombrable, enjoué tendrement,
Fait se disséminer aux champêtres ramilles.
Le féroce chasseur (qui du sentier dévie,
De silence enrobé et doucereusement),
D’une prompte visée sa flèche expédiant,
D’éternité lui donne au lac du Styx un nid.
Pareillement mon cœur, qui librement vaguait
(Bien que depuis longtemps son destin fût tracé),
Là d’où je le craignais le moins, reçut un trait.
Puisqu’en effet l’Archer aveugle m’attendait
Afin de me prendre, à l’insouciance adonné,
Dans vos yeux de clarté lumineuse, en retrait.[Traduction personnelle de Climax69007, en alexandrins classiques assonancés]
Olé
Que l'été vous soit doux et clément !!!
Je rappelle : - Traduction disponible de quatre-vingt-dix Sonnets de Camões, par Anne-Marie Quint, aux éditions Chandeigne (dix euros) ;
- Traduction de son épopée par Roger Bismut, parue en bilingue, "Les Lusiades = Os Lusíadas", dans la collection "Bouquins", chez Robert Laffont (une trentaine d'euros pour une merveilleuse traduction, racontant l'histoire du Portugal et les récits de voyages des Grandes Découvertes au XVIe siècle, avec un intermède éгоtіԛuе fameux sur "l'Île des Amours", avant que reviennent en Europe les intrépides descendants de Lusus qui laisseront bien des enfants aux filles du Vieux de la Mer Poséidon/Nérée).