Un sonnet de Luís Vaz de Camões, le poète portugais majeur du seizième siècle, l'égal de Joachim Du Bellay et surtout, par le mot fulgurant, d'Agrippa d'Aubigné. Mais, au Portugal, il jouit d'une considération qui excède, de beaucoup, tout le bien que les amateurs de poésie française pensent de ces auteurs ; et, sans cesse, des spécialistes s’appliquent à le publier, le comprendre, le discuter...
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POUR CEUX ET CELLES QUI N'ONT PAS LU LES INTRODUCTIONS PRÉCÉDENTES;
Luís Vaz de Camões est celui qui a donné au peuple portugais son épopée "Les Lusiades" (seul poème, en dix Chants, publié de son vivant, excepté un unique sonnet !)
Par la langue employée il fonde le style classique et il fixe le portugais moderne (comme Luther, avec sa traduction de la Bible, l'aura fait pour l'allemand) ; ses poèmes, disséminés au travers de multiples chansonniers manuscrits, ont eu des éditions posthumes (d'où des difficultés dans la reconnaissance de la paternité littéraire).
C'est le poète tutélaire que, chaque année, le Portugal célèbre, le 20 Juin (on présume qu'il est mort le 20 Juin 1580), lors du "Jour de Camões, du Portugal et des Communautés Portugaises" ("Dia de Camões, de Portugal e das Comunidades Portuguesas").
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TEXTE PORTUGAIS :
"A fermosura desta fresca serra
e a sombra dos verdes castanheiros,
o manso caminhar destes ribeiros,
donde toda a tristeza se desterra ;
o rouco som do mar, a estranha terra,
o esconder do sol pelos outeiros,
o recolher dos gados derradeiros,
das nuvens pelo ar a branda guerra ;
enfim, tudo o que a rara natureza
com tanta variedade nos of’rece,
me está, se não te vejo, magoando.
Sem ti, tudo me enoja e me avorrece ;
sem ti, perpetuamente estou passando,
nas mores alegrias, mór tristeza."
TRADUCTION FRANÇAISE :
"L'éclatante merveille au frais de la colline,
Et l’ombre qui s’étend des verts châtaigniers,
Le doux cheminement de ces fleuves ébruité,
Par lesquels la tristesse entière est éconduite ;
Le bruit sourd de la mer, les terres apatrides,
Le soleil qui se cache aux versants inclinés,
Le rappel qui se fait des troupeaux attardés,
Des nuées par les airs la bataille languide ;
Enfin, tout ce qu’avec dilection, la Nature,
Généreuse et variée, vient faire le présent,
Me creuse à vif, si je ne te vois, d’une plaie.
Sans toi, tout m’est ennui et tout m'est importun ;
Sans toi, au long des temps, je plie dessous le faix,
Aux joies démesurées, d'un chagrin sans mesure."
(Traduction personnelle de Climax69007, en alexandrins assonancés)
"Un seul être nous manque, et tout est dépeuplé" !!!