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Les hоmоsехuеls de New York en liesse après la légalisation du mariage gay
LEMONDE pour Le Monde.fr | 26.06.11 | 21h35 • Mis à jour le 26.06.11 | 21h36
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Des ballons forment le drapeau arc-en-ciel à la gay pride de New York, dimanche.
Des ballons forment le drapeau arc-en-ciel à la gay pride de New York, dimanche.AFP/STAN HONDA
New York - C'est "une victoire incroyable, incroyable". Le mot revient en boucle dans sa Ьоuсhе. Galluccio est venu à la Gay Pride de New York avec son mari, Michael, et deux de leurs trois enfants : Adam et Madison, 14 et 15 ans. Seule manque Rosa, 28 ans : "On l'a adoptée quand elle était déjà adolescente", explique cet employé d'une cinquantaine d'année.
La Gay Pride s'est déroulée cette année dans une atmosphère d'euphorie inouïe. L'avant-veille, le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, avait signé la loi votée le jour-même par le Sénat de son Etat, qui a légalisé par 33 voix contre 29 le mariage entre couples du même sехe.
Vendredi, le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, a signé la loi votée le jour-même par le Sénat de son Etat, qui a légalisé le mariage entre couples du même sехe.
Vendredi, le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, a signé la loi votée le jour-même par le Sénat de son Etat, qui a légalisé le mariage entre couples du même sехe.AFP/Jemal Countess
La fête, toute la journée, fut à la hauteur de ce qu'Amy Beth Rich désigne comme un mélange bizarre de certitude et d'incrédulité : "Je savais que je verrai cela arriver de mon vivant, mais jamais je n'aurai cru pouvoir le vivre dans l'instant."
D'abord la parade, ou plutôt la "marche", comme disent les militants (en référence assumée aux marches des droits civiques), depuis la 42e rue, "Midtown" (au milieu de Manhattan) jusqu'au croisement des rues Christopher et Greenwich, près de l'université NYU, où ont émergé il y a presque un demi-siècle les prémices de ce qui allait devenir le mouvement militant LGBT (Lesbiennes, gays, Ьіsехuеls et tгапsgenres).
Ensuite la PrideFest, sorte de foire publique accueillant à la fois des forums de débats, des spectacles et des activités commerciales. Enfin la fête proprement dite – Dance on the Pier –, qui devait se prolonger sur les quais de la rivière Hudson jusqu'à 22 h 30 (la loi locale interdit toute manifestation en extérieur après cette heure).
Amy, qui s'occupe de l'association de recherche sur l'hоmоsехualité féminine Lesbian Herstory Archives (le titre est basé sur un jeu de mots, History et Her-story, la part féminine de l'histoire), vit avec sa fille, Emma Rae, 13 ans, et son "autre mère", Michelle.
Le nombre d'enfants présents dans cette marche avec leurs parents – le plus souvent des couples – indique d'ailleurs combien la percée des législateurs newyorkais reste encore loin des préoccupations et des enjeux contemporains de la communauté hоmоsехuеllе newyorkaise : au-delà du mariage, l'accession au statut parental.
L'autre surprise vient des associations présentes dans le cortège. On y trouve, évidemment, des centaines de groupes militants de tout ordre, de la Black Men Initiative jusqu'au Gay Menhouse Crisis, la plus ancienne association d'aide aux victimes du Sida, en passant par The Trevor Project, qui réunit des jeunes hоmоsехuеls luttant pour abaisser le taux très élevé de suicides parmi leurs homologues adolescents.
De nombreuses pancartes remerciaient le gouverneur de New York, Andrew Cuomo.
De nombreuses pancartes remerciaient le gouverneur de New York, Andrew Cuomo.AFP/STAN HONDA
Mais, plus surprenant, on y rencontre des dizaines de groupes de gays et lesbiennes affichant haut et fort leur appartenance à un "groupe LGBT en entreprise". Il y a là, en nombre, ceux de multinationales comme Google ou l'assureur Life, d'administrations comme le Chœur de la ville de New York, de PME enfin, telle Green Chimney, une entreprise de pose de toitures écologiques.
L'EXPLOIT DU GOUVERNEUR CUOMO
Seul au milieu du cortège, Gregory Cruz brandit une pancarte qu'il a confectionnée : "Merci, gouverneur Cuomo". Celui-ci s'était engagé dans sa campagne, à l'automne dernier, à légaliser le mariage gay.
Démocrate, il s'est personnellement beaucoup investi pour tenir parole et donc parvenir à surmonter l'hostilité d'un Sénat à majorité républicaine. Résultat : quatre sénateurs de l'opposition ont changé d'avis et voté pour la légalisation.
Dimanche, le New York Times, dans une enquête fouillée, détaillait comment le gouverneur avait réussi cet exploit. Il a commencé, il y a quelques semaines, par réunir secrètement "un groupe de donateurs républicains super-riches". Ceux-ci avaient en commun soit d'être hоmоsехuеls, soit d'en avoir parmi leurs très proches (parent, enfant, frère, sœur). Catholique, le gouverneur savait de quoi il retourne : la femme avec qui il partage sa vie, Sandra Lee, a un frère hоmоsехuеl. Il les a convaincus de l'aider à "retourner" suffisamment de voix républicaines pour faire passer la loi sur le mariage gay.
Affaire conclue, une dizaine de ces rupins ont déboursé chacun une "somme à 6 chiffres" qui est allée alimenter un fonds pour battre campagne et persuader quelques républicains réticents bien ciblés de changer opportunément d'avis. Résultat : quatre d'entre eux sont allés grossir le camp de la légalisation, un seul démocrate faisant défection. Cela a suffit à faire triompher le camp du progrès. Une histoire, au fond, incomparablement américaine.
Sylvain Cypel