Au tournant du dix-neuvième siècle vers le vingtième, le débat - le combat - était rude entre républicains bourgeois et partisans de la Sociale, et entre socialistes (dits "autoritaires" par les anarchistes) et les libertaires.
S'inspirant du journal "Le Père Duchesne", apparu durant la Révolution française, "Le Père Peinard" fut le flambeau d'une ligne politique simple : l'indépendance des travailleurs par rapport à tous les hommes politiques, tenus pour des profiteurs et pour les tenants d'une idole aussi néfaste que Dieu ; l'action concertée, simultanée, autonome du prolétariat, s'unissant en une grève générale ; l'investissement, au-delà des groupes affinitaires (bien que le correcteur d'orthographe souligne ce mot en rouge, il est bien français), dans l'action syndicale, de la part des anarchistes ; la haine de tout principe d'autorité politique.
Vous me direz : c'est la doctrine anarchiste. Certes, mais Émile Pouget avait la truсulence du langage, se délectait aux mots vigoureux et directs, et la verdeur des vocables n'avait pas de secret pour lui.
Sur un forum où souvent la brutalité et la vulgarité, immotivées et sans qu'on les assume consciemment, tiennent lieu d'identité, je ne puis que vous recommander la lecture d'un langage qui, par sa violence méditée, poursuivait des fins très précises : la propagande anarchiste. Avec un brio certain.
Je vous recommande, aussi, aux éditions Galilée une plus ancienne anthologie, constituée par les soins de Roger Langlais :
Et, quand bien même vous ne partageriez pas le point de vue anarchiste, avouons que "Le Père Peinard", quant au style et quant à l'effet d'entraînement, est plus percutant et plus réjouissant que, par exemple, l'évêque Bossuet et ses sermons, donnés pour un sommet de la langue persuasive, quant au français du dix-septième siècle et in saeсula saeсulorum.