Sujet de discussion : Les tгоubadours : le site "Lecturae Tropatorum"
sergeclimax69007
Membre suprême
17 février 2015 à 21:03
Le site "Lecturae Tropatorum", publiant dans toutes les langues romanes et en anglais, visent à remédier à la rareté, voire à la carence des interprétations à propos des tгоubadours de langue occitane.
En effet, d'après le texte italien de présentation, s'il y a une relative abondance des éditions fiables, critiques, des tгоubadours, par contre le commentaire suivi d'une chanson, l'interprétation plus large d'un auteur, bref tout le travail nécessaire d'investissement intellectuel pour rendre accessibles et compréhensibles des poètes distants de nous de huit à sept siècles reste encore à mener.
Plutôt que des actes de colloque lus par un public limité, plutôt que des livres, ou des revues à diffusion restreinte, la mise en ligne d'articles d'une haute tenue MAIS TRÈS LISIBLES, favorisant la coopération internationale et divulguant auprès d'un large public une matière intellectuelle qui explore les racines de la lyrique européenne : tel est le pari de ce site plurilingue.
"Lecturae Tropatorum : rivista in rete dedicata all’interpretazione della poesia dei trovatori", de plus, est beau. C'est bien le moins en faveur des tгоubadours.
En illustration musicale, pour vous donner à percevoir ces textes, qui étaient chantés, accompagnés d'instruments et non lus, à l'origine, une des plus belles "canso" que je connaisse, de Bernart de Ventadorn, "can vei la lauzeta mover sas alas contra'l rai", "Quand je vois l'alouette remuer ses ailes aux rayons du soleil".
Chantée par Céline Ricard, me semble-t-il, avec une prononciation occitane restituant celle de l'époque des tгоubadours.
Céline Ricard est la chanteuse attitrée de l'association, qui édite de nombreux CD de collectes et de créations, et qui forme aussi un ensemble musical, "La Talvèra".
Le texte, que je traduis en partie.
Can vei la lauzeta mover/Quand je vois l'alouette remuer de joi sas alas contra·l rai,/De joie ses ailes sous le soleil, que s'oblida e·s laissa chazer/Qu'elle s'ouble et se laisse tomber per la doussor c'al cor li vai,/En vertu de la douceur envahissant son coeur, ai! tan grans enveya m'en ve/Ah ! J'éprouve une très grande епvіе de cui qu'eu veya jauzion!/Envers celle que je vois se réjоuіг ! Meravilhas ai, car desse/Je m'étonne de ce que lo cor de dezirer no·m fon./Mon cœur, à désirer, ne se défasse et déchire (littéralement "ne fonde") Ai, las! tan cuidava saber/Hélas ! Je pensais tant savoir d'amor, e tan petit en sai,/A propos de l'amour et j'en sais si peu de choses car eu d'amar no·m posc tener/Puisque je ne puis me retenir d'aimer celeis don ja pro non aurai./Celle dont jamais je n'obtiendrai la moindre récompense. Tout m'a mo cor, e tout m'a me,/Elle a pris mon cœur et elle m'a pris à moi-même e se mezeis e tot lo mon;/Et elle-même et le monde entier : e can se·m tolc, no·m laisset re/Et, après s'être enlevée, elle ne m'a rien laissé mas dezirer e cor volon./Si ce n'est le fait de désirer et un cœur volontaire. Anc non agui de me poder/Je n'ai plus eu de puissance sur moi ni no fui meus de l'or'en sai/Et je ne fus plus mаîtге de moi depuis le moment que·m laisset en sos olhs vezer/Où elle m'a laissé voir dedans ses yeux, en un miralh que mout me plai./Dans un miroir qui me plaît immensément. Miralhs, pus me mirei en te,/Miroir, plus je me suis admiré en toi, m'an mort li sospir de preon,/Plus m'ont mis à mort mes soupirs si ргоfопԁs, c'aissi·m perdei com perdet se/Et ainsi je me suis perdu tout comme s'est perdu lo bels Narcisus en la fon./Le beau Narcisse dans la fontaine. De las domnas me dezesper;/J'ai un grand désespoir du fait des femmes : ja mais en lor no·m fiarai;/Jamais je ne déposerai ma confiance en elles.... c'aissi com las solh chaptener, enaissi las deschaptenrai. Pois vei c'una pro no m'en te vas leis que·m destrui e'm cofon, totas las dopt'e las mescre, car be sai c'atretals se son. D'aisso.s fa be femna parer ma domna, per qu'e·lh o retrai, car no vol so c'om deu voler, e so c'om li deveda, fai. Chazutz sui en mala merce,/Je suis tombé aux mains de Mauvaise Merci et ai be faih co·l fols en pon;/Et j'ai agi exactement comme le fou e no sai per que m'esdeve,/Et je ne sais pas pourquoi je perds l'esprit mas car trop puyei contra mon. Merces es perduda, per ver/Merci est égarée, pour de vrai ! (et eu non o saubi anc mai!)/(Et, moi, je ne le savais pas encore !), car cilh qui plus en degr'aveI,/Car celui qui devrais en bénéficier no·n a ges; et on la querrai?/N'en bénéficie nullement : et où irai-je la chercher ? A! can mal sembla, qui la ve, qued aquest chaitiu deziron que ja ses leis non aura be, laisse morir, que no l'aon! Pus ab midons no·m pot valer precs ni merces ni·l dreihz qu'eu ai, ni a leis no ven a plazer qu'eu l'am, ja mais no·lh o dirai. Aissi·m part de leis e·m recre; mort m'a, e per mort li respon, e vau m'en, pus ilh no·m rete, chaitius, en issilh, no sai on.
Envoi :
Tristans, ges no·n auretz de me,/Tristan, vous ne recevrez plus rien de moi, qu'eu m'en vau, chaitius, no sai on./Car je m'en vais, pauvre de moi, je ne sais où. De chantar me gic e·m recre,/De faire et dire des chansons je me retire et me dispense, e de joi e d'amor m'escon./Et de l'allégresse et de l'amour je me préserve.
P.S. : "Tristan" est un "escais-nom", un pseudonyme, un de ces surnoms que l'on adoptait pour crypter à qui l'on destinait sa "chanson".
C'est beau, non ?
Voici le genre de textes
auxquels se voue
"Lecturae Tropatorum".
sergeclimax69007
Membre suprême
17 février 2015 à 22:11
La dernière anthologie, accessible, est celle des éditions Paradigme (qui font de véritables efforts pour divulguer la poésie occitane ancienne et les travaux à son sujet) : "Anthologie des Тгоubadours", réunie et traduite par Paul Fabre :
S'il y a ici des amateurs des tгоubadours, qu'ils et elles n'hésitent pas à se manifester ! Ou des connaisseurs des trouvères (déjà moins "amoureux" que les tгоubadours"), ou des Minnesinger, ou des autres surgeons de la lyrique occitane médiévale !!! C'est tellement beau !
Connaissez-vous, SVP,
d'autres sources intéressantes,
accessibles sur la Toile,
outre les articles que nous pourrons
trouver sur "Persée", par exemple ???
Je vous en remercie par avance !!!
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