Certains aiment les livres comme on aime des personnes : Ils les rencontrent, s'en éprennent, s'en déprennet, les caressent, les rejettent, les oublient, les traquent,, les retrouvent,, les possèdent, et les perdent.
Si la vie les empêchent de les collectionner et de les enfermer dans la prison d'une bibliothèque, ils vont leur rendre visite ailleurs et parfois les enlèvent. Ils les rêvent.
Nous connaissons Chalamov l'écrivain des camps, le poête de la Kolyma. Voici Chalamov le lecteur, l'amoureux des livres, parmi les rayonnages de ses bibliothèques.
Editions : Interférences - ISBN : 9 782909 589008 - Broché : 53 pages - Prix :12 €
Mon avis : Volodia
Pour comprendre l'importance que Chalamov accordait aux livres et en l'occurrence aux bibliothèques, il faut remonter à son enfance. Né en 1907 à Vologda (ville importante et place forte au temps des Romanov).
Dans ses souvenirs Chalamov n'a eu, petit enfant, que deux livres : un de conte, un autre de l'alphabet de Tolstoï. A l'école primaire, il n'y avait pas de livres, simplement des manuels jusqu'en 1918 date de l'ouverture de la première bibliothèque ouvrière. Les ouvrages qui 'y trouvaient avaient été réquisitionnés chez des propriétaires terriens.
Il a 10 ans l'année de la Révolution. Ne pouvant faire d'études supérieures en raison de ses origines (fils de pope). Il part pour Moscou en 1923 et réussit l'examen d'entrée de la Faсulté de Droit de la capitale. Afin de payer ses études, il travaille dans une tannerie.
Arrêté une première fois en 1929 pour avoir diffusé "Le Testament de Lénine" , il est envoyé en Sibérie. Libéré en 1931, il revient à moscou et travaille comme journaliste jusqu'à sa seconde arrestation lors des grandes purges de 1937, pour activités contre révolutionnaire trotskiste. Condamné à 17 ans de travaux forcés dans les mines d'or de la Kolyma.
Pendant ces années terribles d'incarcération ou les prisonniers subissaient les pires exactions tant du côté des gardiens que des prisonniers de droit commun vis à vis des prisonniers politiques. Il n'avait aucun moyen de s'évader, même par la pensée, livres, papier et crayons étant interdit. Seuls la faim et le froid l'obsédaient au point qu'il avait perdu son ancienne faсulté de lire, le déshumanisant peu à peu.
Libéré en 1951, il reste encore 2 ans en relégation en Extrême Orient. C'est durant cette période, dans un village de travailleurs libres où il résida, et où il y avait un bibliothèque conséquente de deux mille titres regroupés et conservés avec soin par un vieil érudit qu'il reprit contact avec les livres, qu'il renoua avec cette passion inextinguible.
Ce livre le récit de cette traversée du "désert". De la bêtise et de la cruauté humaine portées aux пuеs par un régime totalitaire.
En 1953, après la mort de Staline il est autorisé à quitter la Kolyma mais reste interdit de séjour à Moscou. Ce n'est qu'en 1956 après le XXème congrès dénonçant le culte de Staline qu'il est réhabilité et revient à moscou.
Il meurt en 1982 dans un asile psychiatrique....