Sujet de discussion : "Que sont mes amis devenus" - Rutebeuf, 13e s.
sergeclimax69007
Membre suprême
14 juin 2014 à 20:12
Comment se fait-il que, parmi les nombreux poètes du Moyen-Âge, ne soient parvenus, comme un legs vivant jusqu'à nous, que les Тгоubadours et Rutebeuf (1230- c.1285) - si nous plaçons François Villon à la charnière du médiéval et de la Renaissance ?
Les Тгоubadours, de langue occitane (la koiné "limousine" mélangeant en une langue artificielle tous les dialectes occitans pour un usage littéraire), auront été, malgré l'armature et les lois formelles et éthiques contraignant le Grand Chant Amoureux, les seuls à exprimer des sentiments raffinés, ayant trait à la vie intérieure, et aux élans sentimentaux. Ceci pour un public aristocratique.
Entre les chants de croisade, les invectives et prises de parti contre les ordres mendiants, entre les genres bien identifiés du Moyen-Âge (poèmes didactiques, mystères, ...), pour un public bourgeois (les citadins des villes bénéficiant d'une franchise seigneuriale), Rutebeuf aura chanté les circonstances de la vie ordinaire, introduisant ainsi le ton de la confidence et le thème de la vie malheureuse, non pas à cause des rebuffades de l'Aimée (ça, c'est la part des Тгоubadours), mais à cause du "guignon", de la malchance.
Pour ce lyrisme exceptionnellement personnel, Rutebeuf est toujours vivant sept siècles après et chanté. Quoi de plus moderne que de prendre à témoin les lecteurs ou les auditeurs à propos de ses misères, tout en les moquant sur un ton sarcastique ou en les déplorant mélancoliquement ?
Et c'est pourquoi Léo Ferré aura mis en musique Rutebeuf :
Et l’interprétation, tellement émouvante, de la polyglotte et internationaliste Joan Baez :
draconis
Légende urbaine
16 juin 2014 à 17:41
L'amour courtois, tout un programme .
Guillaume de Machaut.
sergeclimax69007
Membre suprême
17 juin 2014 à 00:28
Oui, Guillaume de Machaut s'est, lui-même, mis en musique.
En fait, Ikki, je constatais, simplement, que les Тгоubadours sont toujours chantés par les chanteurs d'expressions occitane ; que, par exemple, c'est sous leurs auspices que se sera fondé après la seconde guerre mondiale, et après "La Leçon de Ribérac" de Louis Aragon, l'Institut d’Études Occitanes (un organisme essentiel pour la langue occitane, pour la publication d’œuvres écrites en occitan et, si possible, la revivification de l'occitan).
Et puis que, à l'autre extrémité du spectre du sentiment amoureux, pour ses accents très personnels, Rutebeuf est le seul poète du Moyen-Âge encore bien lisible (bon là j'exagère, il y a aussi Marie de France, les romans de Chrétien de Troyes, Tristan et Iseult, ...), en tout cas le seul du Moyen-Âge à avoir été mis en musique par ce grand divulgateur de la poésie française qu'était Léo Ferré.
Ce qui m'intéressait, c'était la persistance de Rutebeuf !!!
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