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Un frère de trop... - Littérature & poésie

Sujet de discussion : Un frère de trop...
  • gaypacs Membre expérimenté
    gaypacs
    • 3 juin 2012 à 12:33
    Kevin n’aurait jamais dû avoir de petit frère. Ses parents adoptifs l’avaient « commandé » parce qu’ils avaient été incapables de procréer. Il avait quatre ans lorsqu’il quitta (de force) le Honduras. L’ouragan qui avait tué 5000 personnes en 1998 l’avait également privé de parents. Il avait été contraint de changer de pays, de mode de vie, de langue… « Estime-toi heureux d’être avec nous ! », lui avait rétorqué sa « mère », lorsqu’il regrettait de ne pas vivre dans son pays et dans sa famille. Car même son prénom et le nom qu’on lui avait attribués faisaient de lui un étranger.
    Cette situation lui paraissait « vivable » jusqu’à la naissance du « vrai fils » de cette famille qu’on lui avait imposée. Il n’était jamais parvenu à considérer Ludovic comme son petit frère. Il se sentait encore davantage un intrus dans cette maison depuis son arrivée. Durant toute son enfance, il avait eu peur d’être à nouveau abandonné, comme l’étaient les « enfants des rues » en Amérique latine, d’où il venait. Des reportages à la télévision en parlaient. Aussi, il n’avait jamais refusé la « corvée quotidienne » que lui imposaient ses parents illégitimes : « sortir le marmot ! » ; comme on peut sortir le сhіеп de la famille. « Oui bien sûr maman, tout ce que tu veux pour que tu m’aimes comme tu l’aimes lui et que tu ne m’abandonnes pas ! », pensait-il chaque jour. Il se sentait de trop. Si ce « fils » n’était pas sorti du ventre de sa mère, elle l’aurait aimé bien plus. Il était convaincu de cela. Malheureusement, il ne servait que de « serviteur », de « surveillant », de « protecteur » envers celui qui était le plus cher aux yeux de leurs parents, huit ans après avoir été le « fils de compensation ». Sa mère lui montrait suffisamment : Avant lui, elle n’avait d’attention que pour Kevin. Depuis, tout avait changé : « Fais très attention à Ludo, Kevin », « Ne le laisse pas seul un quart de seconde ! », « Tiens-lui la main pour traverser la rue ». Kevin pensait qu’il n’avait plus d’importance. « Peu importe si je meurs, du moment que le vrai fils est en sécurité, n’est-ce pas maman ? Mais s’il disparaissait ? Alors je redeviendrais ton fils.»
    A l’âge de six ans, un petit garçon c’est vif, turbulent, ça court partout sans faire attention aux dangers. Un accident arrive rapidement. Il suffit d’un peu de chance. Le semer attirerait peut-être des kidnappeurs рéԁорhіlеs ? Comme au cinéma. Mais ses parents le rendraient responsables de cela. Donc ils le détesteraient pour de bon. C’était l’inverse de ce qu’il souhaitait. « L’un de nous doit disparaître. Et ça ne peut être que toi ! Car tu n’aurais jamais dû vivre. Plusieurs fois tu as échappé à la mort, mais là personne ne pourra venir au dernier moment, comme lorsque maman m’avait empêché de te noyer dans la baignoire quand tu étais bébé, en entrant à l’improviste. Je suis « le bon fils », comme Macaulay Сulkin dans le film du même nom. On me donnerait le bon dieu sans confession. On me pardonnerait un accident. On ne m’en voudrait pas. Comme cela, c’est moi qui partirait en vacances avec eux cet été.» La veille, ses parents l’avaient en effet informé qu’ils partiraient en Espagne avec Ludovic, qu’ils ne pouvaient l’emmener, car il était en âge de passer des vacances sans eux. Ils l’avaient donc inscrit dans une colonie pour les trois semaines que durerait leur voyage. Comme toujours, Kevin n’avait pas bronché. Il avait seulement riposté sans succès en faisant remarquer qu’il pourrait leur servir d’interprète ; l’espagnol, c’était sa langue maternelle ! Mais intérieurement il avait explosé de colère ! C’en était trop ! Ses parents étaient allés trop loin. Ils l’écartaient définitivement.
    « Où on va?
    - Tu n’as jamais vu la maison vue du ciel, Ludo ?
    - Si, sur internet avec papa.
    - Moi je n’ai pas eu cette chance, dit Kevin, encore plus dépité. Tu verras c’est beaucoup mieux en allant sur la falaise.
    - C’est haut ! Porte-moi.
    - Ok ». Kevin mit Ludovic sur ses épaules et gravit l’ascension.
    Elle fut très éprouvante et Ludovic dut se résigner à marcher plusieurs kilomètres. Celui-ci ne cessait de geindre, qu’il faisait très сhаuԁ et qu’il faudrait faire le même trajet en sens inverse. Kevin grommela qu’il ne devait pas s’inquiéter pour cela, que la descente serait beaucoup plus rapide et moins fatigante. En disant cela, il se sentait à la fois narquois et désolé. Il aurait tellement voulu ne pas en venir jusque là. Mais il n’avait pas le choix. Ludovic prenait trop de place dans le cœur de ses parents. Il devait récupérer son dû.
    Arrivés au plus haut point du trajet, Ludovic se trouva en extase devant le panorama qui s’offrait à lui et remercia chaleureusement son frère en s’agrippant à ses jambes, qui étaient devenues flasques à cause de la fatigue et du vertige que ce dernier éprouvait devant ce grand vide. Kevin repoussa son concurrent en direction du précipice d’une manière si violente que Ludovic prit soudain peur et se mit sur ses gardes. Il s’éloigna de la zone de danger, mais Kevin le rattrapa prestement, le souleva et s’apprêta à le balancer dans le vide comme un vulgaire déchet, lorsque le sol se déroba sous ses pieds. Ludovic en profita pour s’extirper de ses bras forts et roula sur lui-même plusieurs fois. Kevin avait glissé en une fraction de seconde sur la roche humide, mais parvint à se raccrocher à une touffe d’herbe. Il supplia Ludovic de l’aider en lui jurant qu’il voulait seulement lui faire peur, jouer.
    Mais Ludovic était bien trop jeune pour pouvoir sauver son frère. Le poids de Kevin eut raison de l’herbe et de sa folie meurtrière. L’enfant perdit son frère, mais surtout son esprit. Il ne recouvrit plus jamais l’usage de la parole, et fut interné dans un hôpital le reste de sa vie.
    Les enfants si désirés de parents aimants étaient morts. Ces derniers ne connaîtraient jamais la vérité sur cet « accident », conclusion des experts de la police…
  • textoo Légende urbaine
    textoo
    • 3 juin 2012 à 12:39
    Bien triste tous cela,

  • gaypacs Membre expérimenté
    gaypacs
    • 3 juin 2012 à 12:55
    Le but c'est de dire aux parents : n'ayez pas peur, honte de dire a vos enfants "je t'aime". J'ai voulu montrer a quoi cette absence de mots pouvait conduire
  • nuada Membre occasionnel
    nuada
    • 3 juin 2012 à 13:40
    Bonne fête à toutes les mamans qui ont plein d'amour à donner et à recevoir
    dommage que la fin soit si triste
  • jeannaut Membre habitué
    jeannaut
    • 3 juin 2012 à 13:53
    J ai la chair de poule
  • gaypacs Membre expérimenté
    gaypacs
    • 3 juin 2012 à 14:53
    J'espere bien.. C'est le but arg!
    serieux il faut comprendre la "morale" de l'histoire. A force de ne jms avouer ses sentiments (les parents envers Kevin et inversement), ces non dits entrainent une mauvaise interpretation : suis je aimé ou pas? avec les conséquences qu'on peut imaginer : meurtres, suicide, etc la premiere caractéristique des gens en prison.. C'est qu'ils ont tous eu une enfance difficile (statistiquement c'est la vérité).
  • petitangegranddemon Membre habitué
    petitangegranddemon
    • 3 juin 2012 à 16:50
    Très très triste les larmes au yeux allucinant quand meme

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