Battre la campagne est un art délaissé de nos jours, du fait d'une couverture presque uniforme de la Terre par les villes : cela nous retire la matière première de nos délassements !
Ah, voir jaillir, ou s'écouler par saccades effilées, le sang des arbres et des prairies à vaches...
Dans les paisibles meuglements des ruminants, d'une affabilité déconcertante, ou dans les couinements fort civils des porcs, heureux d'être estourbis comme l'attestent maintes enseignes de boucheries arborant le sourire séraphique des bons gros lards trépassés, fouetter, jusqu'à épuiser sa substance, à grands coups redoublés, le vent volage, et le punir de sa légèreté !
Oui, faire tourner l'eau des rivières jusqu'à ce qu'elle soit caillée.
Rabaisser les montagnes présomptueuses par des violences appliquées avec discernement, avec onction et dans un esprit de justice.
Rehausser les plaines en couturant leur dos par les plaies envenimées de l'infamie.
Et ne pas hésiter, plusieurs fois par semaine, à battre la campagne, car si vous ignorez pourquoi vous la châtiez, soyez persuadé qu'elle sait la faute justifiant son expiation.
Pour ce traitement répété, choisissez des vегgеs à la fois ԁосіlеs au mouvement de votre poignet et marquant avec rudesse, sans dilacérer la chair, sans infliger de suite une souffrance intolérable.
Quand vous battez la campagne, savourez ces moments où l'inquiétude précédant la douleur se faufile en elle.
Et préférez de ces vегgеs sifflant à peine, quand elles tranchent les airs et s'appliquent - dura lex sed lex - à la campagne, cette imbécile heureuse, méritant une détestation invétérée.
La justice c'est bien, l'arbitraire c'est encore mieux, en l'occurrence : tout ce vert, ça vous tourne sur le cœur !
Climax69007, le Samedi 22 Août 2015.