Quatrième de couverture :
Pendant une grande partie de sa vie, ma mère a vécu dans la pauvreté et la nécessité, à l'écart de tout, écrasée et parfois même humiliée par la violence masculine. Son existence semblait délimitée pour toujours par cette double ԁоmіпаtіоп, la ԁоmіпаtіоп de classe et celle liée à sa condition de femme.
Pourtant un jour, à quarante-cinq ans, elle s'est révoltée contre cette vie, elle a fui et petit à petit, elle a constitué sa liberté. Ce livre est l'histoire de cette métamorphose.
Editions : Seuil - ISBN : 978 2 02 121254 6 - Broché : 117 pages - Parution avril 2021 -
Mon avis : ChezVolodia
Dans ce livre, Edouard Louis nous parle de sa mère. Ses espoirs tôt déçus de respect et d’indépendance dans son couple, dans la société.
Il l’a regarde vivre, en a parfois honte parce qu’elle est sоumіsе, même lorsque son mari l’humilie en public en la traitant de « grosse vache », parce qu’elle ne parle pas comme il le faudrait en raison d’un manque d’éducation après avoir trop tôt quitté les bancs de l’école, parce qu’elle supporte tout et n’importe quoi sans se rebeller, trouvant moult prétextes à son inertie.
La mère est issue d’un milieu d’ouvriers d’usine. La famille du père est plus chaotique, en marge de la société (chômage, prison, alcoolisme) car même dans la pauvreté, il y a des degrés et on se raccroche comme on peut, et à n’importe quoi afin de ne pas être tout en bas de l’échelle sociale.
Mariée jeune et maltraitée par un premier mari alcoolique et violent, elle se retrouve bloquée à la maison avec deux enfants alors qu’elle n’a pas 20ans. Elle n’aura guère plus de chance avec son second époux, avec lequel elle aura Edouard Louis, puis des jumeaux non désirés, qu’elle souhaite dans un premier temps « faire passer », mais qu’elle finit par accepter bon gré, malgré, par décision du père qui espérait grâce à leur venue divers aides des services sociaux.
Cinq enfants, encore de quoi rester dans la раssivité, sans argent, sans point de chute en cas de départ du domicile conjugal, sans perspective d’avenir. Tout est fait pour la maintenir dans la précarité, la fatalité anéantissant toutes velléités d’indépendance.
La famille étant tombée dans la misère, le père ne pouvant plus travailler, suite à un accident, elle prend un emploi d’aide à domicile faisant la toilette de vieilles dames ce qu’elle n’aimait pas, mais lui permettait de joindre les deux bouts et d’avoir un peu d’argent à elle.
A 45 ans, ses enfants étant grands elle décide que cela suffit et se sépare de son mari. Si lui sombre dans la déchéance, elle, revit. Elle reprend son métier d’aide à domicile qu’à présent elle apprécie car il devient un des instruments de sa libération. Une rencontre avec un autre homme, puis son départ sur Paris afin de vivre avec lui suffit à la transformer, lui redonnant le goût de s’habiller, de se maquiller de redevenir une femme. Ce nouveau bonheur lui a donné une jeunesse qu’elle n’avait jamais eue.
J’ai beaucoup aimé ce livre. Edouard Louis a gagné en maturité. Je n’ai pas ressenti comme dans ses précédents écrits de honte ou de volonté de revanche agressive sur son passé difficile. Ses sentiments envers sa mère semblent apaisés. Reste toujours des contestations dans la véracité de ce récit selon le maire et les habitants de son village, il semble que la vérité soit assez éloignée de la réalité. Toujours est-il que même si cette histoire ne « colle pas » avec celle de sa mère, elle peut être un hommage à toutes ces femmes humbles, asservies, rabaissées, humiliées par la société et dans leur vie de couple parce qu’ignorante et n’ayant pas de défense, celles qu'on croise tous les jours mais qu'on ne voit pas car sans existence.