C'est intéressant, d'autant que le terme a évolué. D'abord usité pour désigner une portion de la population poussée à la délinquance par la misère, il n'a rien perdu de son sens péjoratif originel si ce n'est que le mépris de classe dont il est le vecteur ne concerne pas nécessairement une bourgeoisie regardant de haut les laborieux ou les économes de la débrouille dans une période donnée.
Chez La Fontaine, le chapon traité de racaille grossière et sans esprit par le faucon donne la leçon au rapace. Il fait l'éloge, en creux, de l'inԁосіlité légitime manifestée par tous ceux que les puissants cherchent à plumer.
Si le terme porte désormais plutôt le stéréotype du "mec de banlieue" (reçu en verlan, parfois, comme une marque de reconnaissance au sеіп de ces mêmes milieux), l'on trouve réciproquement cette marque de mépris vis-à-vis d'une racaille politicienne empêtrées dans les affaires de corruption et les prises illégales d'intérêts, ou d'une racaille bourgeoise accapareuse qui en est le socle électoral.Dans la galerie de photos des racailles, d'aucuns mettraient volontiers en bonne place le couple Balkany et bien d'autres du même acabit.
Ceux que l'on désignecomme racaille changent, en tout état de cause, avec les temps, les mœurset les contextes sociaux. Les racailles des années 2000 ne sont plus ni la clientèle douteuse des tapis-francs popularisés par Eugène Sue, ni les Apaches parisiens de la Belle époque, ni les révolutionnaires marxistes vus par les conservateurs, ni les blousons noirs au sujet desquels la presse a nourri une psychose collective dans les années 60.