Parler de rien pour dire quoi ? - Littérature & poésie

Je parlerai de rien, c'est une occupation, rien est absorbant, ne pas confondre avec le néant ; difficile à appréhender, impossible à cerner, rien ne pourra se prêter au jeu des policiers ; entre évanescent et consistant, rien ne peut se déterminer, il est présent quand il est absent, rien se faufile au revers de la transparence, et lui donne une matérialité inapparente ; rien a des yeux de velours, de broussailles et de bois touffus, à peine entraperçus, aussitôt disparus, et l'oubli est son révélateur ; il est un bipède сul-de-jatte, sautant sans mouvement et sans impulsion de plaque de silence en plaque de silence ; rien ne s'enfonce pas dans les déserts, les déserts sont trop fréquentés et surpeuplés, rien est un citadin perché au sommet d'une montagne d'où il jette son absence de corps dans une absence de l'air pour atterrir comme un flocon de neige et se dissoudre sur la terre ; rien n'a pas de portrait-robot, ni physionomie ni psychologie, il se suffit à lui-même dans son insuffisance première ; rien est impalpable et, pris à bras-le-corps, il est beaucoup moins qu'une méduse flottant au gré de l'océan ; rien ne me regarde pas, il est l’œil qui me contient dans son cyclone, il est sourd, aveugle et insensible, mais d'une sensibilité excessive car il ne supporte pas que l'on parle de lui, pour autant que l'on perçoive quoi que ce soit de lui, avec justesse ; vous aurez beau vous éloigner sur la pointe des pieds, comme rien est nulle part, c'est-à-dire partout, vous ne le quitterez pas, bien que vous en ayez l'illusion, celle d'un mouvement flottant sur rien, vous voilà bien avancé, oui vous avez avancé, mais entre vous et rien on ne passerait pas la lame d'un couteau ; rien est comme un frère jumeau, on s'y tromperait, mais quand les masques tombent, apparaît le vide substantiel, un grand impertinent qui vous tire la langue en vous montrant les dents, d'autant plus pernicieux que rien ne se dévoile en rien avec des contours ; imaginez, persévérez, décomposez, rien est rien, et reste hors de portée, tout ce que vous affirmerez vaudra quelque chose, et rien est en-deçà de ces phénomènes ; "rien est rien", dites-vous, holà, vous vous avancez beaucoup, le principe d'identité est étranger à rien, donc.... Rien, dites-vous ! Rien vous fera rentrer cette insulte dans la gorge et аvаlег votre dentier, avec la mâchoire et le reste, de sorte qu'il ne reste rien, c'est-à-dire lui, mais chut, sortez sur la pointe de vos pieds pendant qu'ils demeurent présents, oui, encore une fois, mais (couic !)

Climax69007.

Je reste sans voix.

Puissant

En réponse au message de institoris :

Je reste sans voix.

C'est déjà trop !

En réponse au message de medievale :

Puissant

Rien est toujours au rendez-vous, fidèle infidèle, et vous tombe dessus comme la vérole sur le bas-clergé de ces lieux et des environs ; rien est très fraternel dans sa férocité, pour autant qu'il adopte un cerveau en passant, mine de rien.

Bonjour Climax,
merci pour ce petit rien dont on retient pourtant quelque chose d'impalpable...
Mais ce n'est rien

Bonjour,

Sans vouloir être ringard

allez chercher le sketch "parler pour ne rien dire" d'un certain R. DEVOS, qui resteras pour moi le plus "grand manipulateur de mots" . Youtube archive INA.

Cela reste d'actualité

Ce sketch de Raymond Devos doit être intéressant, mais mon sujet est tout autre : "Parler de rien pour dire quoi ?" Eh bien, pour dire ce rien un rien, et le rien n'est pas rien, il y a beaucoup à dire !

C'est la positivité douteuse mais se profilant de rien !

Parler de rien pour dire quoique?
Parler de tout pour dire quoi?
Un silence souvent en dis beaucoup plus long que des riens et des touts.

Le silence ne dit rien, par essence. Il n'exprime rien, il est, c'est tout. Les humains possèdent un langage pour explorer rien et tout, pour dire leur subjectivité face à ce qui - alors - se trouve constitué en phénomènes représentables ; la fonction du langage, la plus noble, est de se frotter à des réalités peu agréables, difficiles à cerner, dans l'espoir de tendre une passerelle par-dessus des vides !