PREMIER OCTOBRE
A ma chère maman mon plus doux souvenir
C'était alors l'automne et pour toi le printemps
C'était pour moi l'aurore et mes vagissements.
C'était encor la France avant la grande guerre.
C'était beaucoup d'espoir, mais de ressources guère.
J'étais pour tous, pour toi pour lui, le fruit d'amour.
J'étais votre avenir en vous disant bonjour!
Ce fut, premier chagrin d'école, la rentrée.
Ce fut pour moi un frère en sixième année.
Ce fut alors la vie qui déroulait son cours.
Je fus un écolier, sans école et sans cours.
J'appris en la vivant une page d'histoire.
L'ennemi était là sur tout le territoire.
L'homme était parti la femme demeurait.
Sous les bombardements chaque jour on mourait.
Dans la salle à manger, j'appris alors à lire.
Grâce à l'institutrice, évitant le délire,
Comme après la tempête est arrêté le vent,
Comme après son assaut la vague redescend.
Se succèdent aux ans les douloureuses heures:
Sur le sol d'Algérie éloignant les demeures.
Sur le sol de la France assoiffé de nos morts,
Nous arrivons enfin au calme dans nos ports.
C'est une ère nouvelle apportée par Christine,(*)
C'est la maison bien pleine et la joie enfantine.
Cet heureux temps hélas est déjà bien lointain!
Ce sera, je l'espère, encore pour demain,
Pour ces petits enfants, ces nouvelles frimousses
D'autres PREMIER OCTOBRE heureux et sans secousses...
Je l'espérais alors il y quarante ans!
Mais tout seul aujourd'hui... Souvenirs me hantant...
(*) ma fille née le jour de mes trente ans...