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Quelle teinte avait ce regard ferme et têtu ? (page 2) - Littérature & poésie

Sujet de discussion : Quelle teinte avait ce regard ferme et têtu ?
  • greenary Membre élite
    greenary
    • 4 août 2014 à 09:16
    Ikki, ce refuge dans certaines pages heureuses
    d'un passé heureux est un peu curatif pour
    certaines personnes.
    Cela ne signifie pas renier le futur.
    Personnellement, c'est plutôt un état d'esprit que j'ai perdu
    que je regrette que le passé qui a, OOOh combien
    de pages douloureuses aussi.
    Peut être n'as tu pas eu à faire le deuil d'une
    enfance heureuse?
    On est tous différents.
    Mais je ne regrette pas l'époque en tant que telle!
    m'imaginer 30 ans en arrière sans les facilités et
    autres agréments d'aujourd'hui me parait tout
    autant regrettable !
    Le fait d'y penser me procure une nostalgie inversée.
    Bref, il me faudrait le meilleur des 2 mondes!
    qui a dit que j'étais difficile!?

    Enfin le passé ne t'apportera rien, je n'ai jamais compris ce besoin, qu'ont certains de se cloisonner dans des souvenirs, ça me dépasse. L'espoir repose sur une perspective d'avenir, je doute que la solution se trouve dans les pages jaunies d'un album photo (c'est une image).

  • draconis Légende urbaine
    draconis
    • 4 août 2014 à 12:32

    Ikki, tu disposes de ce pouvoir merveilleux qui est de se détacher de son passé et des souffrances qui vont avec?

    Je ne sais pas s'il s'agit là d'un pouvoir , disons qu'il en a toujours été ainsi, je zappe facilement ce qui me dérange, je ne conserve aucune photo, je ne crache pas sur le passé, je crache sur MON passé, non pas qu'il fût terrible, c'est loin d'être le cas, les individus passent dans ma vie sans y laisser la moindre trace. Il y a un avantage à cela, mon ciel est en permanence d'un bleu intense, je n'ai pas de coups de blues, me disant que cette journée est merveilleuse et que celle de demain le sera davantage.
    Une des raisons pour lesquelles les commémorations diverses me sortent par les yeux, ce qui appartient au passé (autre que les superbes histoires de chevalier qui me font rêver) doit être enterré sous 2 Km de terre et oublié à jamais.
    J'ai également perdu des proches, je suis pragmatique, ils ne sont plus là aujourd'hui, je n'y pense pas, la page a été tournée le lendemain même de leur disparition.

    Ikki, ce refuge dans certaines pages heureuses
    d'un passé heureux est un peu curatif pour
    certaines personnes.

    Green, je n'en suis pas persuadé, je pense qu'il s'agit là d'un obstacle au bonheur, on devient prisonnier de ce passé.

    On ne peut penser aux instants heureux et feindre d'oublier que l'on ne pourra jamais plus les revivre, que ces instants sont perdus à jamais, et là c'est la déprime.

    Dans le cas de notre ami, revivre en permanence ces années de passion aujourd'hui révolues, l'empêche de s'investir dans une autre, le souvenir est tellement présent que toute nouvelle relation serait vécue comme une trahison, je le lis souvent, et ne pense pas me tromper, nous en avons d'ailleurs déjà discuté.
  • 50_nuances_de_bi Membre suprême
    50_nuances_de_bi
    • 4 août 2014 à 13:17
    IKKI : cela s' appel tout simplement le Nihilisme
  • nigivir Membre élite
    nigivir
    • 4 août 2014 à 13:25
    Ikki, j'admire ton détachement!
    J'aimerais tellement que les pages de ma vie se tournent sans laisser de souffrances. Sans laisser de traces, non, ça, je n'y aspire pas, parce que le passé sert d'exemple et on ne doit pas l'oublier.

    Mais si je puis me permettre une remarque, tu emploies le mot "cracher" en parlant de ton passé, c'est très fort, voire même péjoratif, non?

    Je te rejoins tout à fait sur l'idée que s'enfermer dans le passé rend indisponible pour ce qui survient dans le présent. Mais c'est le principe du deuil, et c'est plus ou moins long suivant les personnes. Ce n'est pas quelque chose dont on décide en fait.

    Disons que le plus dur, et Climax en parle dans ce poème et dans d'autres aussi, c'est l'idée de ne plus voir la personne, la toucher, se souvenir de ses traits, enfin se détacher des choses concrètes quoi.
    Parce que sinon, effectivement, et Greenary l'évoque, la pensée est assez forte pour rendre vivantes et présentes les personnes qui sont mortes et ne sont plus dans notre entourage.
    Mais l'équilibre s'atteint, je pense, lorsque le souvenir n'empêche plus et n'interdit plus de vivre mais devient moteur de vie justement.

    Il ne s'agit pas tout à fait de la même situation, mais pour ma part, je te dirais que même vingt ans après, il m'arrive toujours d'être inondée de douleur à la pensée de la mort de ma grand-mère (imagine, elle aurait eu 100 ans cette année!).
    Pendant longtemps, j'en avais honte, non seulement parce que dans l'éducation que j'ai reçue, on ne montre pas ses sentiments, mais aussi à cause de culpabilités diverses avec lesquelles bien sûr je n'ai rien à voir.
    Mais maintenant, je me donne le droit à la souffrance, je la contemple dans son étendue, je la hurle, je l'écris, je la laisse exploser. Je l'évacue en somme et ne la réprime plus.
    Et du coup, ça passe parce que forcément, la vie reprend ses droits. Et ça revient de moins en moins. Appelons cela "acceptation".
    Mais d'un autre côté, c'est aussi le souvenir de ma grand-mère et surtout l'empreinte de l'amour qu'elle m'a prodigué qui justement me fait avancer et me fait vivre.

    Voilà, merci Ikki et pardon, Climax, pour le petit aparté.
  • nothingness Membre élite
    nothingness
    • 4 août 2014 à 15:11
    J'aime pas tellement commenter quand j'apprécie, parce que "décrire c'est réduire", cela dit, je n'en pense pas moins.
    Et j'ai également particulièrement aimé la fin. Ce texte me fait écho. Merci du partage, climax.
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 4 août 2014 à 18:56
    Vous savez, Greenary, Hasbeen, Biworld, Ikki et les autres, vous êtes en plein dans le sujet (pour m'exprimer d'une manière professогаlе ) ; et la difficulté est bien :

    - d'abord d'accéder au sentiment de la perte ;
    - de ressentir cette perte ;
    - de transformer peu à peu cette douleur en "autre chose" ;
    - de ne pas céder - oh que tu as raison, Greenary - à la mélancolie (celle qui me ferait rejoindre un objet de relation interne, c'est-à-dire la trace constituée en moi par celui que j'ai aimé, dans la mort) ;
    - de ne pas fixer le souvenir sous le signe du passé éternellement regrettable, mais d'admettre qu'il se tгапsfigure (et là, Greenary, tu as encore raison, c'est le deuil le plus difficile qui soit).

    ------------------------------------------------------------------------

    Pour le moment, j'en suis à pleurer chaque jour, par une subite montée de larmes ; et, heureusement que je pars voir ma vieille mère en Bretagne cette semaine (j'écris cela pour que vous ne vous fassiez pas de soucis), parce que j'ai besoin d'être dorloté (eh oui, "à mon âge").

    -------------------------------------------------------------------------

    Je vous remercie toutes et tous pour vos réflexions.

    ---------------------------------------------------------------------------

    Nothingness, la dernière ligne du poème est celle que j'ai ressentie avec le plus de sincérité :

    "A quoi tient la mémoire ? Au peu qui est rendu."

    Mais de ce peu, je puis faire beaucoup... Les souvenirs sont visuels, olfactifs, d'atmosphères, kinesthésiques ; ils se focalisent sur des "détails" (condensation), couleur, morceau de paysage, moments de journées ; et je commence à voir poindre mon Simon en manches de chemise, mais c'est encore bien douloureux.

    Je préfère avoir cette souffrance-là (comme tu as raison, Hasbeen) plutôt que de ne pas y accéder, et la supporter.

    -----------------------------------------------------------------------

    Quelle teinte avait ce regard noir et têtu ?
    Quelle façon avaient ces gestes en leur cadence ?
    Quel horizon avait sa voix dans sa puissance ?
    Quelle couleur avaient sa peau et son poil dru ?

    Quel portugais parlais-tu avec grande aisance ?
    Quelle période du soleil appréciais-tu ?
    Quel cactus ? Quel arbuste ? Quel arbre ? Quel fétu ?
    Qui te hantait manière de réminiscence ?

    Ta face est effacée : les traits sont dispersés ;
    Les temps sont éboulés, les temps nous ont versés ;
    Le futur vегsаtіlе et l'aurore spectrale

    Diffusent une froideur donnant un mauvais hâle :
    Il demeure un sourire ébauché suspendu.
    A quoi tient la mémoire ? Au peu qui est rendu.

    Troisième version le Lundi 4 Août 2014.
  • nothingness Membre élite
    nothingness
    • 4 août 2014 à 19:19
    parce que j'ai besoin d'être dorloté (eh oui, "à mon âge").

    A tout âge climax Je pense.

    Nothingness, la dernière ligne du poème est celle que j'ai ressenti avec le plus de sincérité :

    "A quoi tient la mémoire ? Au peu qui est rendu."

    (...)

    Je préfère avoir cette souffrance-là (comme tu as raison, Hasbeen) plutôt que de ne pas y accéder, et la supporter.

    Ca m'a fait aussi un peu la même impression (à la lecture, pour ma part, du coup).

    Et je suis bien d'accord avec toi (vous) sur ce point : peut-être malheureusement, mais j'aime à garder tous mes souvenirs bien en mémoire, aussi douloureux puissent-ils m'apparaître ; au fond, je n'ai pas епvіе d'abandonner les transports négatifs qui peuvent m'habiter parfois (mon côté mаsо' certainement ! :p).
  • nigivir Membre élite
    nigivir
    • 4 août 2014 à 21:54
    J'aime pas tellement commenter quand j'apprécie, parce que "décrire c'est réduire", cela dit, je n'en pense pas moins.
    Et j'ai également particulièrement aimé la fin. Ce texte me fait écho. Merci du partage, climax.

    J'aime beaucoup ce que tu écris: "décrire, c'est réduire", c'est tellement vrai!
    Mais j'aime aussi partager les "échos" que provoque une œuvre ou une ехрéгіепсе chez celle et celui qui la crée, la lit, la voit, l'entend, la vit.
    En fait, j'aime bien partager les choses qui parlent à nos âmes respectives.

    Justement, je suis en train de lire (non, de dévorer) Du Spirituel dans l'art de Kandinsky, bon les choses sont un peu confuses pour moi parfois, mais il évoque cette importance de la "résonance intérieure" et parle de l'art comme d' "une puissance qui a un but et doit servir à l’évolution et à l’affinement de l’âme humaine."

    L'art sous toutes ses formes, mais aussi l'échange sont des moyens d'extérioriser (= mettre à distance) "notre monde intérieur" et c'est peut-être le seul moyen de prendre du recul et de nous détacher de la souffrance, qui, je crois, est bien le point commun et l'objectif de chaque être humain.

    Bon séjour en Bretagne, Climax, fais-toi bien dorloter!
  • nothingness Membre élite
    nothingness
    • 4 août 2014 à 22:33
    J'aime beaucoup ce que tu écris: "décrire, c'est réduire", c'est tellement vrai!
    Oui, je crois que cette phrase (que m'avait sortie une fois ma mère) illustre parfaitement ce que je peux ressentir parfois, lorsque je ne trouve pas mes mots pour m'exprimer "convenablement".

    Mais j'aime aussi partager les "échos" que provoque une œuvre ou une ехрéгіепсе chez celle et celui qui la crée, la lit, la voit, l'entend, la vit.
    En fait, j'aime bien partager les choses qui parlent à nos âmes respectives.

    J'abonde encore dans ton sens, d'où que j'apprécie son partage et que je tenais tout de même à lui signifier que j'avais fait "bonne réception" de son écrit.

    L'art sous toutes ses formes, mais aussi l'échange sont des moyens d'extérioriser (= mettre à distance) "notre monde intérieur" et c'est peut-être le seul moyen de prendre du recul et de nous détacher de la souffrance, qui, je crois, est bien le point commun et l'objectif de chaque être humain.
    Là encore, je suis tout à fait d'accord avec toi ; j'ai pu le constater encore, pas plus tard qu'hier soir, parler est libérateur :) Du moins, il soulage au moins pour partie (et peut permettre de dormir plus paisiblement, voire dormir tout court... ^^).
  • nigivir Membre élite
    nigivir
    • 4 août 2014 à 22:40
    parler est libérateur :) Du moins, il soulage au moins pour partie (et peut permettre de dormir plus paisiblement, voire dormir tout court... ^^).

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