RÊVE EN ARDENNES
L'Ardenne "Solitaire" en ses crêtes boisées
S'enfermait dans la brume estompant les couleurs.
Sur les sentes perdu, perplexe à leurs croisées
Le mаîtге et sa monture, oubliant leurs douleurs,
Se traînent au hasard,
résistant au blizzard:
Il voudrait un refuge
Pour la nuit ce tгапsfuge!
Les ramures au vent se sont entrecroisées
En chassant les oiseaux du printemps roucouleurs,
La neige a recouvert sur les pentes ardoisées
Erosant les à pics de flocons rémouleurs
Qui troublent le regard
Du voyageur hagard
Souhaitant une luge
Pour quitter ce déluge.
Le cheval se cabre:
Devant lui surgit le noir
Mur d'un vieux manoir
Sinistre, ô combien macabre!...
En scrutant la pénombre à travers le rideau
De flocons dentelés, posé sur le рlап d'eau
Il aperçoit le pont qui traverse les douves.
Tout près, glaçant le sang, glaріssеnt quelques louves.
Il pousse son pur-sang sur les bois vermoulus
Glissant à tous les pas harassés et moulus.
Hennissant, les naseaux ԁіlаtés de fumées
Les lèvres bouillonnant de baves éсumées,
L'animal a franchi d'un bond victorieux
Les éboulis vers le portail mystérieux.
La herse est relevée et la porte au vent grince.
Sur le blason s'inscrit la couronne d'un prince.
Descendant de monture, alors le cavalier
En poussant le vantail, distingue un escalier
S'élevant dans le noir au fond du vestibule.
Le plafond écroulé qui se démantibule
Enchevêtre la poutre au milieu des gravois,
Répercutant les bruits par l'écho de leurs voix.
sur la gauche se trouve une cave voûtée
Où se tenait la garde autrefois redoutée.
C'est là qu'il conduisit en quittant l'étrier
Et qu'il déharnacha son fougueux destrier
Afin qu'il se repose. Enjambant les décombres
Il se fraye un chemin entre les ruines sombres.
Après avoir gravi quelques emmarchements
Il peut atteindre alors, d'anciens appartements.
La salle d'apparat sous les voûtes gothiques
N'est plus qu'un grand amas de pierres chaotiques,
Cependant au pignon demeurent accrochés
les vestiges d'un âtre aux landiers embrochés:
Oeuvre de démesure! En cette cheminée
Une grume complète était acheminée
Entre deux bancs de pierre où l'on pouvait s'asseoir,
Dessous l'ample manteau de l'immense encensoir.
C'est ici qu'il rassemble au feu de l'étincelle
De maigres bouts de bois que le temps amoncelle...
Il réchauffe à la flamme un hère au corps tгапsi
Dans cette humide pièce où l'on sent le moisi,
Tandis que sur les murs devient dansante l'ombre
Des multiples acteurs dont s'anime le nombre.
Mais bientôt son fапtаsmе organise un décor
Dans lequel vient revivre un Prince au pourpoint d'or
Pour le festin duquel on a dressé la table.
C'est un vieillard chenu mais au visage affable.
Sous la lune glabre
La ruine encore on peut voir
Pour nous émouvoir,
Qui dans le grand vent palabre!!!