En réponse au message de tete-de-linotte :
Pourquoi la sensibilité augmente en vieillissant, parce que mon père pleure mon grand-père pleure
Le dénominateur commun à leur tristesse, c'est peut-être toi.
Plus sérieusement, je ne pense pas que la sensibilité augmente en vieillissant, du moins en tant que règle générale.
La sensiblerie, peut-être…
Alors que sensibilité est la faсulté de percevoir des sensations, la sensiblerie est une traduction, souvent à l'excès et déformée de ce qu'on a perçu.
La sensibilité fait appel au présent, la sensiblerie, au passé.
Ce point me semble fondamental.
Un exemple: En 2007, j'ai tué mon сhіеп par accident.
Sur le moment, j'en ai été dévasté (sensibilité).
Quand j'y repense encore aujourd'hui, cela me fait encore mal (sensiblerie + sentiment de culpabilité).
Dans un monde idéal, cela ne devrait plus être qu'un souvenir désagréable…
L'autre paramètre fondamental étant dans l'acceptation des choses qui nous arrivent.
La révolte, le sentiment d'injustice font leur lit de sillons que l'on creuse dans notre esprit; autant de cicatrices douloureuses qui vont refaire surface et ajouter à leur douleur propre celle que le rappel du souvenir ajoute à chaque fois que l'on y pense.
Il faut être conscient de cela car, en le comprenant, on peut faire bouger les lignes.
La sensibilité est ce qui nous rend vivant; cette caractéristique nous fait rire ou pleurer en fonction de ce qui nous arrive.
Être ou devenir insensible est de l'ordre du malheur, même si cela peut-être une mesure de l'ordre de l'instinct de survie face à des souffrances qui nous dépassent.
Cela fonctionne mais, le problème est que l'on survit au lieu de vivre…
De plus, la sensibilité nous permet d'aimer.
Associer le temps qui passe et cette qualité me semble hasardeux dans la mesure où, pour ne pas ou plus souffrir, il est fréquent de constater que l'on se rend insensible.
Pour se donner le change, on compense sa perte de sensibilité par de la sensiblerie.
Par contre, le temps qui passe peut aussi permettre à sa sensibilité de ne plus être un pur sang fou mais devenir un solide percheron qui va travailler avec soi pour révéler une humanité grandissante avec le temps.
Dans ce cadre, elle va nous bonifier, nous renforcer dans notre capacité à aimer notre environnement, dont les humains.
Notamment dans notre perception sensible du coté précaire des choses qui nous fait saisir en tant qu'opportunité de s'aimer ce qui n'est que possibilité à saisir ou à laisser sans cela.
Sans ce sentiment d'urgence du présent qui ne se reproduit pas; sans ces moments entre père et grand-père et fils dont on sait qu'ils n'ont qu'un temps, on garde souvent ses sentiments pour soi…
Mon conseil si ce que tu perçois de tes aïeuls n'est pas que de la sensiblerie et de apitoiement sur soi-même, c'est de les prendre aussi en tant que moments uniques de ta vie.
Ces moments qui ouvrent des portes dans ton cœur et qui permettent ensuite à d'autre choses d'y rentrer et d'en sortir.
Ne sois pas troublé de trouver cela bizarre; c'est le privilège de ta jeunesse.
N'en préjuge pas que tu sois moins sensible mais simplement que tu es une construction et qu'il te manque logiquement l'image de ta maison terminée.
En attendant, profite de ta vie sans t’appesantir outre mesure au sujet de ce qui te passe assez logiquement par dessus la tête ou qui t'interpelle.
Sois conscient déjà que tu es très mûr pour ton âge et que cela procède certainement de tes malheurs familiaux.
C'est con à dire mais le malheur est aussi un bon tuteur pour faire d'une tête de linotte un adulte bien dans sa tête et dans ses роmреs.
Faut juste parvenir à le digérer, ce qui peut aussi être le travail d'une vie…