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Hubert Selby, Jr. - Un entretien radiophonique - Littérature & poésie

Sujet de discussion : Hubert Selby, Jr. - Un entretien radiophonique
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 27 décembre 2014 à 22:30
    L'auteur de "Last exit to Brooklyn" était un être rare : un seul livre critique lui a été consacré en anglais ("Understanding Hubert Selby, Jr." aux University of Carolina Press), un seul livre d'entretiens aura été publié en français (quinze entretiens parus d'abord dans "Libération" puis chez Christian Bourgois éditeur) sous le titre "Selby, de Brooklyn" (ISBN 2-267-00441-0). Après ses romans, un seul livre de nouvelles, "Chansons de la neige silencieuse", et puis cette rareté posthume, "Psaumes", avec un DVD audio et vidéo (ISBN 2-915453-01-2) où il nous lit ses derniers textes.

    Si vous avez, comme moi, été touché, troublé, imprégné, influencé - et davantage - que par tout autre univers romanesque, ainsi que durablement habité par le monde et les personnages de Selby, non pas à cause de son réalisme coup-de-poing (ce n'était que le moyen de vous prendre et captiver), mais à cause de son infinie tendresse et de son absence de jugement moral envers ces paumés (par quoi se signale le grand écrivain), si vous avez été fasciné par tous ses "Harry" et introduit dans des complexités humaines au-delà des apparences du mal et du bien, vous entendrez avec рlаіsіг cet entretien radiophonique - ou plutôt ce monologue - de Hubert Selby Jr., entrecoupé de larges plages de musique au banjo (ce qu'il a dû apprécier).

    Sa voix exténuée d'homme qui n'avait qu'un poumon, disant pourquoi, avant de mourir, il lui fallait écrire... Bien sûr il y a un interlocuteur, mais celui-ci reste muet, et écoute.

    Oui, c'est en anglais, et même moi plutôt lusophone je fais l'effort de comprendre et - s'il le faut - je m'y reprendrai à plusieurs fois !!!
    Cela le mérite.


    https://archive.org/details/RadioFreeGunslingerepisode70


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    ---- Les premiers personnages d'hоmоsехuеls que j'ai vus, d'une manière convaincante, animés dans un cadre romanesque sont celui du tгаvеstі Tralala, personnage peu reluisant, mais touchant par son appétit de vivre, de se distinguer, de ne pas s'aplatir, quelles que soient les péripéties de sa vie ( et de sa mort, dans le roman "Last exit to Brooklyn") et celui du syndicaliste Harry. Le premier Juif qui m'a ému est cette vieille dame qui reste collée à sa télé et attend de passer, elle aussi, à une de ses émissions préférées. Le premier assassin qui m'ait fait toucher la ргоfопԁеur derrière le crime est le personnage de "La geôle". La littérature de Hubert Selby Jr. est un apprentissage de l'humanité, dans sa laideur, sa vilenie, sa bassesse, ses fourvoiements, ses aliénations, ses choix désastreux, ses soifs de rédemption, ses haines, et ses aspirations à n'être pas le jouet de soi-même, sans que cela nous soit signifié et que cela tourne au prêche (excepté dans "The willow tree", son ultime roman qui - justement - est son roman le moins réussi, parce qu'un des personnages s'identifie, sans que personne puisse s'y tromper, comme le porte-parole du romancier moralisateur).


    Un univers initiatique

    lu à quinze ou seize ans

    (ben oui, j'avais une mère libérale).
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 27 décembre 2014 à 23:48
    Oui, le tгаvеstі Tralala n'est, en rien, exemplaire ; il ne pouvait servir de modèle d'identification pour mener une vie, ou, du moins, affermir quelque peu, dignement, une identité des plus labiles chez l'adolescent que j'étais ; il est veule, maniéré, méprisé de son frère aîné, pleurnichard, son initiation sехuеllе a été déterminé davantage par un effet de la curiosité ou par l'enchaînement des choses que par une réelle affection, il a le chic pour s'éprendre d'une petite frappe qui le traite comme un objet sехuеl et ne veut rien entendre de sa propre libido à lui. Oui, Tralala n'est, en aucune manière, exemplaire et, pourtant, dans sa déviation mаsосhіstе, son désir sехuеl est plus consistant que celui de bien de personnages de notre réalité commune ou d'univers romanesques, et pour cela il est inoubliable, quel que soit son destin.
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 27 décembre 2014 à 23:51
    Phrase remarquable de Hubert Selby : "Et j'ai compris que je n'avais pas le droit de m'interposer entre les personnages que je créais et le lecteur."



    Mais, ceci, il l'a oublié dans son dernier roman, "The willow tree", "Le saule".


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  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 29 décembre 2014 à 21:10
    Je n'ose croire que personne, ici, n'a été touché par l'univers romanesque de Hubert Selby Jr., fasciné par son approche du mal, retourné par des romans auprès desquels ceux de Patrick Modiano sont des bluettes insignifiantes (pour parler Prix Nobel, et combien cette institution ne pourra jamais récompenser des écrivains comme Hubert Selby Jr.)

    Ou alors la littérature est entrée dans une décadence irrémédiable.

    --- Ah une dernière remarque à propos de Tralala : à certains moments, il est donné pour une femme (cf. le tableau final, quand il est mort), mais à d'autres moments, c'est un tгаvеstі. Mystère de l'ambiguïté maintenue dans ses contradictions.
  • cactus_sss Membre suprême
    cactus_sss
    • 29 décembre 2014 à 22:13
    Peut-être devrais-tu t'y prendre autrement pour intéresser un lectorat... Je sais pas, être un peu moins austère, un peu moins hermétique, par exemple, non ?
  • vinsang Membre suprême
    vinsang
    • 29 décembre 2014 à 23:24
    Peut-être devrais-tu t'y prendre autrement pour intéresser un lectorat... Je sais pas, être un peu moins austère, un peu moins hermétique, par exemple, non ?

    Un peu moins long ?
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 29 décembre 2014 à 23:55
    "Un peu moins long" ? Comment exposer, en quelques adjectifs, et en prenant quelques exemples de personnages, la puissance de Hubert Selby Jr. ? Je l'ai fait, malheureusement cela ne peut pas s'expédier, c'est ainsi.

    "Moins austère" ? L'univers de Selby n'est pas des plus comiques : je me vois mal faire des jeux de mots à son propos.

    Quoi qu'il en soit, l'essentiel est d'avoir mis en évidence une heureuse trouvaille : Hubert Selby Jr. parlant à une radio et disant le sens de son entreprise, son éthique d'écrivain, ...

    Alors
  • vinsang Membre suprême
    vinsang
    • 30 décembre 2014 à 10:33
    "Un peu moins long" ? Comment exposer, en quelques adjectifs, et en prenant quelques exemples de personnages, la puissance de Hubert Selby Jr. ? Je l'ai fait, malheureusement cela ne peut pas s'expédier, c'est ainsi.

    "Moins austère" ? L'univers de Selby n'est pas des plus comiques : je me vois mal faire des jeux de mots à son propos.

    Quoi qu'il en soit, l'essentiel est d'avoir mis en évidence une heureuse trouvaille : Hubert Selby Jr. parlant à une radio et disant le sens de son entreprise, son éthique d'écrivain, ...

    Alors

    Je suis mauvaise langue. En plus ce genre de sujet m'intéressent généralement. Promis je prendrai le temps de te lire pour me faire un avis un peu plus constructif
  • sergeclimax69007 Membre suprême
    sergeclimax69007
    • 30 décembre 2014 à 21:55
    En fait, j'ai tenté de qualifier et de décrire, assez brièvement et sommairement - quoi qu'il en semble !!! - l'univers de Hubert Selby Jr., dans l'espoir de pouvoir partager, avec quelqu'un(e) qui connaîtrait mieux que moi cet écrivain un enthousiasme. Pour affiner ma perception, pour échanger des impressions. Bref : pour discuter à loisir. C'est donc raté, tant pis.

    ---- L'éthique que professe Hubert Selby Jr. - ne pas s'interposer entre les personnages et les lecteurs - rejoint le jugement lapidaire d'Oscar Wilde devant son juge, l'accusant de mauvaise influence, d'immoralité, et même d'immoralisme à propos du "Portrait de Dorian Gray" : "Une œuvre n'est pas morale ou immorale, elle est bien écrite ou mal écrite, c'est tout." C'est cette retenue morale qui permet à un auteur de ne pas limiter son champ d'écriture.
    Chaque écrivain a sa morale dont il doit faire l'économie en écrivant ses histoires.
  • draconis Légende urbaine
    draconis
    • 30 décembre 2014 à 21:58
    Mais qui est Hubert Selby ?

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