Sujet de discussion : "Les Troisièmes Couteaux" du capitalisme
sergeclimax69007
Membre suprême
14 mars 2014 à 22:32
Je ne peux m'empêcher de "poster" cette chanson de Bernard Lavilliers, déjà bien ancienne, "Les Troisièmes Couteaux", dans la catégorie "Politique", ce n'est pas une chansonnette anodine ; elle me fait rire, vraiment !
J'ai rarement entendu une chanson satirique aussi bien tournée, à propos des imbroglios et des manœuvres ordinaires du capital financier, de ses sociétés anonymes, de ses réseaux obscurs, de ses flous d'identité : pourtant, jamais l'acсumulation de la richesse, la capitalisation, n'aura été aussi individuelle (voyez le classement annuel des fortunes dans le monde par le magazine "Forbes", et ces milliardaires dont la capitalisation est inconcevable, irreprésentable, pour le commun des esprits), mais, jamais, cette capitalisation n'aura été autant acquise par le moyen de mécanismes anonymes tгапsnationaux de spéculation, dans une ronde boursière interminable au travers des réseaux interconnectés des ordinateurs des places boursières, anneau en orbite autour de la planète Terre.
Je ne prétends à aucune discussion sur les bien-fondés du capitalisme, sur ses prétendus bienfaits, sur son horizon qui serait ultime, et le dernier, et l'éternel avenir des hommes ; je me délecte, en toute malveillance, et je souris comme une baleine, en écoutant cette chanson, qui vise juste après tant d'années.
Le tableau n'est pas noirci ; c'est (toujours) notre monde ordinaire, avec ses maquereaux qui ont de l'entregent, ses intermédiaires, ses papes, ses marchands de produits financiers qui ont boutique sur rue et qui affichent un semblant d'honorabilité, une auréole de bienfaisance les ornant pour donner le change ; c'est (toujours) notre monde, avec ses gestionnaires, dont ceux de l'appareil d’État, obséquieux, obligeants, complaisants envers ceux qu'ils admirent et ceux qu'ils servent, envers les capitalistes (cf. le dernier "Pacte" du président prétendument socialiste Hollande avec le MEDEF - le patronat de France -, et la subtilisation subséquente de trente milliards d'euros aux allocataires percevant des Allocations Familiales).
" Politiquement leurs idéaux sont très ciblés sur deux critères : entre Mad Max et l'abbé Pierre" !!!
Trois lignes suffisent à Bernard Lavilliers, pour croquer et résumer la morale politique de la "gouvernance", "gouvernance" qui navigue entre, d'une part, les guerres apocalyptiques à la Mad Max, pour déstructurer et piller les pays riches en ressources et, d'autre part, la charité-spectacle, à la manière de l'abbé Pierre, pour soutirer les larmes et endormir les alarmes (la "gouvernance", comme ces gens-là, dans leur jargon introuvable et incroyable, nomment leurs fonctions prépondérantes et banalisent leurs trafics d'influence) : trois lignes pesées au trébuchet, et envoyées !
Toute chanson du type de "La Carmagnole", une version rarissime de "L'Internationale", ou une version de la très belle chanson des Partisans italiens, j'ai nommée l'émouvante "Bella ciao", ou une version de "Le Temps des cerises" sera la bienvenue !
Ou les chants de Victor Jara, assassiné par la junte chilienne du général Pinochet, ou ceux de Violeta Parra. Ou ceux du "mangeux de terre", Gaston Couté. Par exemple. Vous verrez bien !
Pour le reste, c'est l'éсume purulente des jours !!!
PS : merci au talent de Bernard Lavilliers, qui illustre cette chronique d'humeur !
Une chanson, tout comme un dessin semble-t-il, vaut bien un millier de mots !!!
sergeclimax69007
Membre suprême
15 mars 2014 à 05:16
J'accours à mes demandes, presque avant de les exprimer ou qu'elles ne se formulent en un langage articulé : miracle du désir ; et puisque je vous suggérais Gaston Couté, expliquons, brièvement, qui fut Gaston Couté.
Venu de la ville où François Villon eut à manger des "poires d'angoisse " de la part de Thibault d'Aussigny, évêque, qui l'avait emprisonné en un сul de basse-fosse, et dont Villon écrit en son "Testament" qu'il ne tient rien de lui, et qu'il n'est ni son cerf (son serf) ni sa biche, manière de l'accuser de mœurs hоmоsехuеllеs, venu donc de la ville de Meung-sur-Loire, Gaston Couté - tout comme Villon - maniait l'ironie, et il parlait le langage dru de la Beauce, dont il maniait à la perfection le dialecte d'oïl ; cette veine de révolte paysanne lui inspira, après être "monté" à Paris, de belles pièces en français de la capitale - français mâtiné d'une parlure villageoise -, pièces mal payées dans les cabarets de Montmartre, où le bourgeois parisien venait "se dessaler" en frayant avec une faune pittoresque mais où une constante mise en accusation à la longue lui gâchait la digestion ; puis, Gaston Couté devint une manière de pamphlétaire pour le journal de Gustave Hervé, "La Guerre Sociale", où à pondre une chanson par jour, il put au moins s'assurer de quoi survivre, peu de temps, car il mourut jeune : né en 1880, il est mort en 1911, ce qui lui aura épargné de voir "La Guerre Sociale" de Gustave Hervé tourner à la feuille de propagande militariste, anti-allemande, vantant les beautés de la mort pour la patrie, "au champ d'honneur".
"Les mangeux de terre" sont les profiteurs de l'époque, ceux qui spéculent sur la terre et la détournent de sa fonction nourricière. Ou, plus ordinairement, les paysans qui, dépouillés de tout, ont pour nourriture la terre. Expression à double sens.
Grâce aux éditions "La Matière Noire", beau nom pour une maison éditant le libertaire Gaston Couté, il y a quatre volumes d'"Œuvres Complètes", enfin accessibles, sous la forme de livres numériques, à quatre-vingt dix-neuf centimes d'euros le livre (eh oui !)
Par ailleurs, parmi les vingt-trois résultats du moteur de recherche sur le site d'une grande librairie, signalons chez "Regain de Lecture", paru en 2009, pour vingt euros :
sergeclimax69007
Membre suprême
15 mars 2014 à 05:52
"Bella ciao", chanson populaire italienne, est devenue le chant de ralliement des partisans italien combattant les armes à la main le régime fasciste italien, alliant ainsi la poésie la plus native à des nécessités très pratiques de lutte contre le fascisme, cet agent politique qui aura sauvé la mise - c'est-à-dire leurs profits - aux grands propriétaires terriens du Mezzogiorno et aux grands industriels du Nord de l'Italie, contre la montée révolutionnaire des années 1920, qui s'exprimait par des grèves insurrectionnelles, des occupations d'usines, et des manifestations massives, posant finalement, en Italie, la question du pouvoir et celle de la propriété des moyens de production.
cactus_sss
Membre suprême
15 mars 2014 à 13:26
J'ai un Opinel, ça compte ? Et un Laguiole aussi... Mais j'en ai pas un 3ème !
textoo
Légende urbaine
15 mars 2014 à 13:51
Bonjour Climax,
Cette chanson de Nanard des années 80 que j'avais complètement oublié, n'a hélas pas pris une ride.
Un sacré visionnaire avec du texte explicite, engagé et gênant parfois pour les concernés.
Merci d'avoir réactivé ce point
sergeclimax69007
Membre suprême
15 mars 2014 à 16:39
Bonjour Climax,
Cette chanson de Nanard des années 80 que j'avais complètement oublié, n'a hélas pas pris une ride.
Un sacré visionnaire avec du texte explicite, engagé et gênant parfois pour les concernés.
Merci d'avoir réactivé ce point
Hélas, les rides ne lui sont pas venues ! Et je souligne, comme toi, ce "malheureusement, cela n'a pas changé". Oui, c'est un texte à charge ! Mais un texte qui a de la nuance ! Et la beauté de l'humour.
De plus, la vidéo n'est pas mal faite (euphémisme !)
Ce "point" est, hélas, toujours асtіf ; réactivons notre conscience de ces manifestations ordinaires du capitalisme au stade financier, et plus précisément, dans sa phase spéculative, si jamais la conscience nous en avait quittés.
Comme j'apprécierais que les oiseaux du ciel, gambillant, dansant leur vol strident au Printemps, avec leur plongées ravies et leurs montées extatiques, soient le seul spectacle qui nous retienne.
Et, comme j'apprécierais que les chants de Pablo Neruda, célébrant les métaux et les ressources de l'Amérique du Sud, soient des chants disant les nuances des couleurs, les ргоfопԁеurs de la terre, les vestiges du soleil résidant aux paillettes de l'or et aux éclats sombres de l'argent, et que n'y soit pas mentionnée l'histoire des nombreux agents de la bourgeoisie compradore, des généraux sanglants, des agents de la United Fruit Company, des fonctionnaires de la Counter Intelligence Agency, des tueurs galonnés qui précipitèrent de leurs hélicoptères dans l'océan Atlantique les corps torturés des Argentins, des armées ensuite coordonnées par le Рlап Condor.
sergeclimax69007
Membre suprême
15 mars 2014 à 16:42
J'ai un Opinel, ça compte ? Et un Laguiole aussi... Mais j'en ai pas un 3ème !
Que veux-tu, tu seras deuxième couteau, quelle promotion !
sergeclimax69007
Membre suprême
15 mars 2014 à 17:24
Le capitalisme, dans sa version fasciste, lorsque le régime parlementaire a échoué à protéger ses profits, lorsque la collaboration des Partis appelés socialiste et communiste dans les Fronts populaires avec les partis de la bourgeoisie a préparé la contre-révolution, détruit, et la beauté du chant.
Il interdit les livres (il y eut des autodafés de bibliothèques au Chili), et emprisonne et torture et exécute (des dizaines de milliers de morts, l'on ne sait combien d'exilés), et se met au service du capital financier international : les nationalisations du gouvernement de Salvador Allende ayant alarmé le capital nord-américain, Henry Kissinger - le futur prix Nobel de la paix - et la Counter Intelligence Agency (CIA), comme chacun le sait sur la base de documents déclassifiés par le Congrès des États-Unis d'Amérique, préparèrent le coup d’État, pour abattre le régime du légaliste et fossoyeur de la Révolution, le président Salvador Allende.
Et les économistes de "l’École de Chicago" eurent un pays tout entier, comme champ de manœuvres, pour mettre en application leurs рlапs économiques, qui se résument à la misère pour les travailleurs (ah, les "Chicago boys" savent réduire le "coût du travail", eux !!!), à "non à l’intervention de l'État", "oui à l'investissement financier dans tous les domaines de la vie" (d'où les dernières manifestations des étudiants chiliens pour des universités gratuites).
Victor Jara a fait partie des assassinés ; c'était la voix majeure de son pays, pour la chanson, comme la voix du grand poète (hélas stalinien) Pablo Neruda, mort encerclé à résidence quelques jours après le "golpe" de la junte militaire, reste et demeure, pour son amour des paysages, des hommes, des minerais, des circonstances historiques, des lumières, de l'Amérique du Sud en son tout, celle de la plus haute poésie latino-américaine.
Il faut lire "Le Chant Général" de Neruda ! Et écouter Victor Jara !
DES CHANSONS DE VICTOR JARA :
La traduction à un moment traduit "la violeta" par "la violette", c'est une erreur, il s'agit - en espagnol et en portugais l'on met l'article défini devant les prénoms, par amitié - de "la Violeta", de Violeta Parra.
Hommage à Ernesto "Che" Guevara.
Je "poste" cette chanson bien que la tactique guévariste du "foquisme" (créer des foyers - "foco" signifiant "foyer" - de guérilla pour combattre l'armée des régimes sud-américains et espérer, depuis les zones "libérées", rallier la "mаssе" des travailleurs, mаssе vue comme une matière раssіvе) aura conduit le meilleur de la génération des militants communistes à une mort très prévisible dans les années 1960 et 1970 ; seule la constitution d'un Parti des Travailleurs et celle de la Centrale Unitaire des Travailleurs, organisant les travailleurs salariés, auront miné le régime militaire, issu du coup d’État contre le président João Goulart, "Jango" pour les Brésiliens (coup d’État appelé par les militaires "la Révolution de 1964", dans un humour noir involontaire et selon la technique du détournement de la signification des mots) et seules ces deux organisations, le PT et la CUT, par leur existence auront entraîné la fin du régime militaire et de ses séquelles ; le cas brésilien est un cas d'école, montrant qu'il n'y a pas d'"avant-garde" auto-proclamée, qui puisse donner des leçons à un peuple, et le domestiquer selon ses vues extérieures et ses dogmes, l'ехрéгіепсе du cours de l’histoire brésilienne venant vérifier la devise de la Première Internationale, "l'émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes." (OUI CE "POST" est POLITIQUE !!!)
sergeclimax69007
Membre suprême
16 mars 2014 à 01:20
Pablo Neruda, "El Canto General", mis en musique par Mikis Theodorakis, qui en a fait une Cantate.
Je me souviens encore de l'aspect du disque en vinyle et de la couverture le protégeant et l'embellissant ; le coup d’État au Chili, la destruction des espoirs populaires, la destruction de la culture, l’obscurantisme s'abattant sur le pays de Pablo Neruda, de Violeta Parra, de Victor Jara, les assassinats des militants politiques et des syndicalistes parqués dans le stade de Santiago, la fuite en exil des rescapés étaient dans les esprits de tous les partisans du socialisme, quelle que soit leur tendance ; la diffusion et l'exécution de la Cantate de M. Theodorakis a été une magistrale réponse de résistance aux généraux, en défense de la culture chilienne.
Le passage consacré à la United Fruit Company, grand propriétaire terrien, grand instigateur de coups d’État contre les peuples d'Amérique, grand trust qui détruit les cultures vivrières des paysans d'Amérique du Sud, afin de faire prospérer la banane ou tout autre fruit vепԁables sur le marché international.
cactus_sss
Membre suprême
16 mars 2014 à 10:42
J'ai un Opinel, ça compte ? Et un Laguiole aussi... Mais j'en ai pas un 3ème !
Que veux-tu, tu seras deuxième couteau, quelle promotion !
Pour moi, la promotion ne vaut que lorsqu'elle est professionnelle. D'ailleurs, depuis peu, je lorgne un poste de cadre sup, qui à n'en pas douter, me sera attribué avant la fin de l'année !
Je n'ai certes pas fait de longues études, je n'ai pas énormément de connaissances (surtout parce que j'étais un Ьгапlеuг et que mes priorités étaient bien ailleurs) mais ça ne m'a pas empêché de pas trop mal m'en sortir, néanmoins !