Quand on parle de discrimination, on ne parle pas que du ressenti de certains individus envers un autre groupe, on parle surtout d'un système discriminatoire qui prend racine dans la culture, dans la société, dans sa structure et son histoire. Et pour le groupe visé, soit le groupe ou la classe exploitée, marginalisée, de se retourner contre l'oppresseur, c'est tout à fait prévisible et sain, puisqu'il s'agit d'une étape préparatoire à la révolte et que cela démontre une prise de conscience de la situation. Je pense d'ailleurs que dans l'expression d'une méfiance ou d'une rancoeur envers le groupe d'oppresseurs, en ce qui concerne nos pairs LGBT, il faut voir une expression maladroite d'un mépris pertinent et fondé des mécanismes de l'oppression hétéгоsехuеllе ou de l'hétéгоsехisme, ou du carcan hétéronormatif.
Ainsi et parallèlement, j'espère bien que les jeunes descendants d'immigrants se retournent tous un jour dans leur vie contre les "résidents de souche" qui, consciemment ou non, les stigmatisent. Je sais qu'enfant d'une famille très pauvre, j'ai longtemps nourri un mépris amer envers les membres des classes moyenne et bourgeoise (et, d'ailleurs, ce mépris ne s'est pas encore tout à fait évanoui, mais je suis appaisée en quelques sortes par l'éducation que je me suis faite). En tant qu'organisme humain principalement basé sur un système oestrogénial, j'ai longtemps bichonné une rancoeur envers les organismes testostéronés. Le terreau de mes rancoeurs n'a jamais été l'ignorance ou un défaut de caractère, ou une cicatrice psychologique, mais bel et bien une prise de conscience de ma place dans le monde. Et ma colère était fondée. Et mon appaisement a toujours été, non pas une élan de bonté cordiale, ni une illumination mystique, mais l'acquisition d'un nouveau pouvoir à travers la connaissance et l'éducation. Oh, le pouvoirs des mots et des idées! Et ainsi, en vérité, je vous le dis (gnark gnark), si hétérophobie il y a, c'est une excellente chose, car cette haine particulière envers les inégalités est le moteur des quelques révolutions et progrès sociaux, les fruits desquels nous jouissons de nos jours!