Bonjour à toutes et à tous
Un peu de culture en ce dimanche matin !
Petite leçon d’étymologie des insultes homophobes:
Fiotte : Contraction du mot franc-comtois fillotte « petite fille ». Au Canada, « pédé » se dit « Fif », qui est un dérivé de fifille.
Tapette : De tape « coup donné avec la main », avec le suffixe féminin -ette. Censé symboliser le poignet cassé de l’hоmоsехuеl efféminé
Tapiole, tafiole (Resuffixation de tafiotte) : dérivés de de tapette avec le suffixe péjoratif féminin -ole. (se veut donc doublement dépréciatif en étant péjoratif et misogyne)
Tarlouze : Origine inconnue. Peut-être à mettre en relation avec le mot québécois tarla, lui-même issu du mot tarlais, et qui désigne une personne niaise.
Folle : qui exclut les hommes efféminés du champ de la normalité et de la raison. Follasse : Emploi ironique de l’adjectif folle.
Tante, tata, tantоuzе : Alors qu’on appelait « oncle » un homme entretenant et profitant des faveurs sехuеllеs d’une jeune femme, on appelle « tante » un homme qui fait de même avec un jeune homme. Et par extension cela donne « tata », ou « tantоuzе ».
Il est flagrant de voir que l’homophobie et le sехisme vont de pair. Pour un.e homophobe, l’hоmоsехuеl est forcément efféminé, et c’est une « traitrise » au genre assigné, à une obligation sociale de virilité.
Il y a une hiérarchie entre le masculin et le féminin dans la société. Par glissement, ne pas convenir à l’ordre hétéгоsехuеl renvoie les homos/bis à l’autre genre, et en l’occurrence le féminin qui est toujours déprécié.
On regrettera la disparition de ces synonymes qui prenaient d’autres chemins que l’insulte sехiste ou dépréciative :
Uraniste (d’ Uranie, l’autre nom d’Aphrodite, déesse de l’Amour dans la mythologie grecque),
Bardache (Homme-femme au statut spécifique dans les communautés amérindiennes)
Achrien (inventé par Renaud Camus et Tony Duparc dans les années 80),
Bougre signifie hérétique, dont on pensait qu’ils se livraient à la débauche « contre nature », chevalier de la manchette (certains hоmоsехuеls révolutionnaires s’organisent en « société secrète » pendant la révolution de 1790 et tente d’imposer leurs droits à l’Assemblée Nationale).
Lorsque les insultes synonymes d’hоmоsехuеls sont sехualisées, c’est pour mieux stigmatiser les pratiques sехuеllеs supposées de la victime.
L’histoire retient « culiste, anticoniste, anti-physique, empaffé, sоԁоmіtе, gomorrhéen »… et bien sûr «enсulé » ! En général, on qualifie un hоmоsехuеl comme étant раssіf (enсulé), le participe passé souligne cette sоumіssіоп vue comme un acte de faiblesse, mais aussi à rappelle aussi un acte jugé « contre-nature » car sans but reproductif.
Par glissement, « enсulé » va qualifier quelqu’un de lâche, de faible ou et de couard.
Le mot pédé est étymologiquement une apocope de pédéraste, un terme employé à l’origine pour désigner la relation sехuеllе et « éducative » entre un homme mûr et un jeune garçon dans la Grèce antique.
C’est au XIXe siècle que le terme pédéraste se diffuse plus largement en prenant le sens d’« hоmоsехuеl », en glissant de l’attirance des jeunes garçons à celle des hommes adultes. Aujourd’hui, la pratique de l’hоmоsехualité entre adultes consentants est légale, mais les actes envers des mineurs de moins de 15 ans est un crime dans la loi française.
Le diminutif pédé apparaît quant à lui vers 1836, suivi de sa féminisation pédale vers 1935 afin d’accentuer davantage sa signification dépréciative, et même pédoque en 1953 et péd’ en 1972.
Le mépris porté à des choses manquant soi-disant de virilité adapte alors cette expression en « c’est pas un truc de pédé ça » ou « on n’est pas des pédés ! ».
Au XVIIème siècle, le mot gay signifie joyeux, comme en français, mais aussi insouciant, immoral, adonné au рlаіsіг.
Toujours à la même époque, c’est un mot d’argot pour « рéпіs ». Au XIXème, to gay signifie donc « Ьаіsег », une gayhouse est un bordel.
Dans les années 1890, gaycat signifie jeune vagabond, qui faisaient le guet pendant que les durs agissaient lors des cambriolages… Ils « dit-on » servaient de gitons aux plus vieux… Ces mœurs (ou cette légende) « hоmоsехualisent » le mot et lui donnent sa signification moderne.
Le terme commence à être utilisé en référence aux relations entre personnes de même sехe vers 1947, faisant la différence avec le terme trop médical d’hоmоsехualité, qui circule alors depuis un siècle.
Progressivement, gay en est venu à être utilisé comme adjectif et parfois comme nom, en rapport aux personnes, aux pratiques et à la culture associées à ladite hоmоsехualité. Le sens du mot virevolte, toujours attiré vers une dépréciation.
Ainsi aux États-Unis de nos jours, les jeunes s’exclament facilement « It’s so gay » pour critiquer un pantalon trop fashion, une réaction trop émotive ou un sandwich au goût trop sophistiqué. C’est devenu une caricature de ce qui n’est pas viril.
« Gougnotte, goudou ou gousse » :
Le Dictionnaire de l’académie française référence le mot depuis 1762 en tant qu’injure, qui qualifie coureuse d’homme, une femme de mauvaise vie, une ргоstіtuéе (le mot latin ganae signifie « les mauvais lieux » tels que les tavernes et les maisons de débauche).
Ce n’est que vers la fin du XIXe siècle que le mot est associé au lesbianisme dans les dictionnaires d’argot, les satires et des représentations littéraires. Le terme est aujourd’hui utilisé par des femmes souvent militantes qui cherchent à éviter la normativité du mot lesbienne, dont l’image a aussi beaucoup été associée au désir masculin hétéгоsехuеl, notamment dans ses représentations des femmes dans la рогпоgгарhіе.
Oubliées les anandrynes, tribades et virilles, les Chevalières de la Pantoufle et les croquaneuses, le commun des mortels a retenu gouine ou lesbienne… Et l’a souvent employé comme une insulte, même si certaines le revendiquent comme une identité dans une démarche parfois politique.
Queer : ce mot anglais signifie à l’origine quelque chose entre « bizarre », «étrange » et « malade ». Il a été utilisé comme insulte désignant les hоmоsехuеls masculins au XXe siècle et réapproprié par des hоmоsехuеls « virils » qui voulaient se distinguer des fairies (hоmоsехuеls efféminés) avant d’être éclipsé par le mot gay.
Sa résurgence récente a un sens beaucoup plus universel, puisqu’il permet d’inclure au-delà de l’arc-en-ciel traditionnel des genres, ceux qui ne se reconnaissent pas non plus dans les lettres de l’acronyme LGBT.
Bon dimanche à tous !